Extrait du site https://www.france-jeunes.net

L'amour pur...


Je suis un garçon parano et angoissé, fou d'amour pour sa copine. On s'est plus ou moins disputé sur MSN. Voilà le mail que j'ai écrit à ma copine juste après, sur le coup d'une illumination. Vous ne connaissez pas le contexte, ce n'est pas grave, peut-être que vous pourrez en tirer quelque chose.



"Hum, peut-être ke ce texte est faux. C'est dur à dire. Moi j'ai compris au feeling. Après, traduire ça par des mots, c'est dur et forcément moins juste. Peut-être ke je suis passé à coté de toute la vérité, peut-être aussi que je suis passé à coté de tout ce que j'ai senti quand j'ai compris.

Commen j'ai compris ? En fait c'est au moment où je t'ai dis "Je t'aime" au téléphone et où toi t'as rien répondu. J'ai raccroché et là je me suis dis "putain, mais je l'admire"."


Insaisissable, c’est le mot. On pourrait croire que c’est moi le plus complexe, parce que c’est moi qui me pose et qui pose le plus de questions, c’est moi qui fait étalage de mes sentiments, qui pleurniche, m’angoisse et dit « Vous pouvez pas me comprendre. » Mais non, ces manifestations sont au contraire des éléments qui permettent sans souci de me cerner. Je n’ai finalement rien de bien particulier et j’ai beaucoup de faibles semblables en ce monde. On peut sans encombre me coller une étiquette. J’ai un fond, ce qui ne m’empêche pas d’être profond.
Mais Elle ! C’est elle l’insaisissable. Elle trompe, elle manipule, elle se manipule, elle se joue un jeu, elle ne se pose pas tout un tas de questions. Elle trompe, elle manipule, certes, mais pas de la même manière que moi. Là où moi je fais étalage de sentiments, d’émotion, de passion, elle brouille chez elle les traces. Elle manipule pour mieux se cacher. Je manipule pour manipuler, pour obtenir ce qu’en fait j’attend et je cherche. En manipulant, je me manipule moi-même, je transforme mes sentiments, je les dévie, je les étend, je les compresse, je m’éloigne, avec des mots, de ce qu’il y a de vrai. Je suis pris à mon propre piège.
En se cachant, elle maintient ses sentiments intacts et purs. Tout reste sain et limpide. Mais c’est dur. Elle renonce au bavardage pleurnichard et aux grands mots. Elle garde tout ce poids en elle-même. Un poids qui se fait sentir quand je veux le lui faire abandonner. Comment échapper à ce poids ? En jouant un jeu. Le jeu de la cruelle désintéressée. Je tente de lui faire lâcher prise, de briser ses forces, mais elle résiste et cette résistance me fait du mal. Je lui dis une chose et j’attend qu’elle me dise cette même chose que j’attends d’elle. Elle me répond par son contraire ou par l’ironie. Pourquoi répèterait-elle indéfiniment cette parole par laquelle je la bombarde moi, sans cesse ?
Elle montre son mépris pour ma faiblesse et se joue de cette faiblesse. Pour rester pur, intact et clair avec soi-même, il ne faut pas se poser des questions ni penser à l’avenir. Il faut se fier à son premier ressenti et faire confiance à l’Autre.
Elle a peur de ce qu’elle appelle son « sadisme ». C’est ce sadisme qui lui permet de rester forte. Il est dangereux pour celui à qui il s’adresse, si celui-ci ne décide pas aussi de changer et de devenir clair avec lui-même. S’il ne change pas, ce sadisme le consomme et le tue. S’il change, ce qui n’est pas facile, son jeu à Elle devient inutile, Elle n’a plus à se battre contre celui qui voulait la bouffer, car cette menace a disparu.

Alors tous deux peuvent enfin se dire « Je t’Aime », purement et simplement, le cœur léger, heureux de leur amour.
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