Extrait du site https://www.france-jeunes.net

Lettre à un Poilu


Après 6 mois de guerre, Etienne Tanty dresse un bilan d'une guerre dont les Français étaient bien les seuls à avoir pu penser qu'elle serait courte. Ca fait " seulement " 6 mois qu'il est au front, et pourant il n'en peut plus, il est limite suicidaire. Voici les quelques mots que son frère a pu lui envoyer...



Lundi 3 février 1915


Mon cher frère,

D'après ce que je vois, ton moral est au plus bas et ta santé ne va guère mieux.
Je constate aussi à ta façon décrire, que ton passage à l'Ecole Normale se fait ressentir : tu n'as en rien perdu ta philosophie, ta façon de tourner les mots avec justesse, de rendre histoire des faits qui sont réels.

Malgré ton malheur tu trouves la force de nous écrire, de décrire tes conditions de vie.
Saches qu'on reçoit toujours avec joie tout ton courier même s'il n'est pas bien gai, chose que nous comprenons.

Heureusement que tes lettres sont là pour nous montrer la vraie vie de poilu, dans les bois, voire sous terre.
Car, vois-tu, les journaux comme " Le Matin " ne cessent de vanter vos offensives sans parler de la façon dont vous vivez.

Soi vaillant, ne perds pas ton courage.
Ne penses pas à la mort mais plutôt à la vie. A TA vie, celle que tu auras en rentrant, car oui, TU RENTRERAS !
Tu as toujours été courageux et " la fatalité, c'est l'excuse des âmes sans volonté " [Romain Rolland] ; et de la volonté tu en as, non ?

Tiens, au moment où je t'écris, un rayon de soleil viens de traverser ma vitre.
Non en fait, c'est ta vitre puisque je suis dans ta chambre qui est bien vide depuis ton départ.


Etienne, tu as toujours été ma lanterne, mon guide. Un exemple de grand frère pour moi qui ai toujours été un peu perdu.
Je souffre avec toi, mais pourtant j'ai L'ESPOIR ; je garde en moi l'espoir et le foi qu'un jour tu reviendras, tu rentreras par la porte et crieras comme à ton habitude : " Coucou, c'est moi !" !
Et je descendrais les escaliers en courant, me jeterais dans tes bras et la guerre serais FINIE, oui, tout ça serait terminé !

Courage !

Je t'embrasse fort.

Stéphane.
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