Extrait du site https://www.france-jeunes.net

Je suis mort un 11 septembre 3


John est devenu un ange gardien, il veille sur trois protégés, mais ce n'est pas de tout repos. Malgré tout, il aprécie sa vie sur "la passerelle", et est vouée à sa nouvelle mission : veiller sur les humains.



Il y a un grand lac, à nos pieds.
Et dans ce lac, des milliers de gens font l'amour.
Je sais, cela peut paraître un peu farfelu, mais considérez les choses de la manière suivante :
Ces hommes et ces femmes, sont en train de concevoir les futurs êtres qui peupleront la Terre.
Au cours des premières années de leur vie, ces petits êtres auront besoin d'être protégés à tous moments, ils vont devoir prendre des décisions, faire des choix, et nous, les anges, seront là pour les y aider.

J'ai accepté la proposition de Morphéus, alias Andrew, et j'ai enrôlé Matt avec moi, mon ancien camarade de classe.
Nous sommes dix futurs anges, autour de Morphéus, qui, je viens de le constater, a un grade assez élevé dans la hiérarchie des "accompagnateurs" (comme au club Med, en fait).

Les enfants sont en train de naître.
Chacun d'entre nous doit choisir trois enfants, trois petits êtres qu'il devra protéger durant toute leur vie, et accompagner ici quand ils mourront.
Ho, je sais, la tâche paraît ardue, mais ici le temps n'existe pas, tout se déroule beaucoup plus vite, une vie humaine équivaut à environ un ou deux ans, pour nous.

Morphéus a dû accompagner des centaines d'hommes et de femmes, et d'enfants.

Chacun notre tour, nous pointons le doigt vers un enfant.
Il est difficile de choisir, je voudrais tous les prendre sous mon aile.
Certains sont déjà très mal partis, je vois d'ici un petit garçon qui est né dans une ambulance, sur le bord d'une autoroute, lorsqu'il est né, ses parents étaient déjà morts.
Sur la centaine d'enfants qui viennent de naître et dont nous allons nous occuper, il y a :

10 orphelins
24 nés sous X
32 vont grandir dans un milieu social et familial difficile.
9 sont handicapés mentaux
1 a une maladie orpheline.

Comment choisir, j'ai l'impression d'avoir le choix entre la guillotine et la prison à vie, autant dire que mes choix sont limités.

Quand mon tour arrive, je choisis une petite fille russe, Natacha, dont les parents sont assez pauvres.
Un petit garçon, Maxence, français, dont je n'ai rien de particulier à dire.
Un autre petit garçon, Chris, américain de mère écrivain et de père pianiste, il est sourd.

Natacha, Maxence, et Chris, sont encore à la maternité, personne ne sait encore que Chris est sourd, il va avoir des débuts difficiles, je décide de m'occuper de lui en priorité.

Nous volons chacun de notre côté, je vais à Boston, Texas, à la clinique privé San Augusto, voir Chris.

Quand j'entre dans la pièce, le bébé hurle, des oncles et des tantes sont penchés au-dessus du berceau, Chris ne comprend pas.
Il voit des visages se succéder au-dessus de lui, ce qu'il voit surtout, pour l'instant, se sont des ombres. Il y a de l'agitation, mais il ne comprend pas où il est.
Pourquoi il fait si froid ?
Pourquoi tout est si lumineux ?
Pourquoi je ne bouge plus, alors que j'étais sans cesse bercé par les mouvements de ma mère ?
Pourquoi je ne perçois plus les battements de son cœur ? Je veux retourner d'où je viens !

Je me penche à mon tour au-dessus du berceau, s'il ne m'entend pas, nous nous comprenons tout de même.
Je lui envoie des "lueurs chaudes", des sortes de vibrations chaleureuses et rassurantes, en apposant ma main à quelques centimètres de sa tête. Il se calme, sa mère le prend et le donne le sein.

A présent, je vais voir Natacha.

Dieu, me dis-je, si dans la vie les voyages étaient si rapides et si simples, j'en aurais vu, du pays, mais je me rattrape à présent.

Natacha n'a pas la chance d'être née dans une clinique privée, l'hygiène de ces lieux est déplorable.
Qu'importe, Natacha est en bonne santé, et elle est bien entourée.
Elle a deux frères, des jumeaux, de six ans, une grande sœur de 20 ans, un papa, et une maman.
Je vois à leurs vêtements, qu'ils sont modestes, mais ils ont beaucoup d'amour à lui donner, Natacha est déjà chez elle, tout va bien, je file voir Maxence, direction la France.

Nantes, maternité du CHU.
Maxence ne pleure pas non plus, j'espère qu'ils seront toujours aussi tranquilles, mes chérubins. Maman berce le petit berceau en chantant, papa filme, tout va bien.

Je décide de retourner dans l'endroit que j'appelle à présent "la passerelle", parce qu'elle n'est qu'une étape avant de passer à autre chose.

Matt est là aussi, je flotte vers lui.
-"Dieu, j'ai du pain sur la planche ! Se plaint il.
-"Qu'est ce qui se passe ?
-"Mon protégé vient de naître, il est déjà en réa.
-"En réanimation ? Qu'a t'il ?
-"Une déficience cardiaque, il va peut être nous rejoindre plus tôt que prévu.
-"Alors tu devras l'accompagner.
-"Mais je sens qu'il m'appelle, j'y vais, à plus tard.
-"Salut !"

Je me sens comme un docteur. Je voulais être docteur, quand j'étais gosse, ma mère me disait qu'il fallait bien travailler à l'école, et moi je ne comprenais pas en quoi les tables de
multiplications et les accords du participe passé pouvaient sauver des gens.

Ma grand-mère arrive.
-"Bonjour, grand-mère.
-"Bonjour, John, tu veilles sur tes protégés ?

De là où nous étions, devant le grand lac, nous pouvions voir évoluer ceux que nous appelions nos "protégés".

-"Et oui, je veille au grain. Dis moi grand-mère, tu as choisi une bien belle apparence, aujourd'hui.

Elle paraissait avoir trente ans, et étaient vêtue d'une longue robe de soirée noire.

-"Merci, John. Dis moi, viens tu faire un tour avec moi par là bas ?
Elle me désignait un endroit qui ressemblait à un tableau de Seurat, et où les enfants aimaient à jouer.
-"Avec plaisir, mes petits n'ont pas besoin de mes services, pour l'instant.

A peine eûmes-nous le temps d'assister à une partie de cache-cache, que Natacha m'appelait.
Je filais au quartier sud de saint Peters bourg.

Dans son lit, Natacha suffoquait, elle s'était coincé la tête sous une peluche, qu'un de ses frères avait glissé dans le lit.

Les poils du petit ours lui étaient entrés dans la bouche, elle ne pouvait pas crier, tout le monde dormait dans la maison.
Je ne pouvais pas enlever la peluche moi-même, je n'avais pas ce pouvoir, mais je me glissais dans le rêve de sa mère, un rêve sans queue ni tête où il était question d'éléphants se traînant dans la neige, (la fatigue, sans doute), et je lui envoyais l'image de sa petite fille, pleurant.
Immédiatement, la maman se réveilla, et alla jeter un coup d'œil dans la chambre de ses enfants. Elle se précipita auprès du berceau, enleva la peluche, et les poils de l'ourson de la bouche de sa fille, et emmena Natacha dormir avec elle, dans le lit parental.
Elle était sauvée.

Au passage elle dit au père de Natacha :
-"C'est incroyable, j' ai rêvé qu'elle pleurait, et je la trouve là, qui suffoque, merci mon Dieu.
-"Amen", dit le père en se retournant vers le mur.

C'était la première fois qu'on m'appelait Dieu !

A peine le temps de savourer ma victoire, et c'est Chris, qui m'apellait.

Il était sorti de la maternité depuis trois mois (je vous ai dit que le temps passait très vite), et déjà sa mère sentait que quelque chose n'allait pas.
Ils étaient chez le docteur.

-"Je ne comprends pas, il ne sourit pas. Nous lui parlons, nous jouons avec lui, mais rien à faire.
-"Il ne sourit jamais ?
-"C'est rare. Il aime bien son petit singe en peluche, de style éponge, il aime son toucher, et il lui arrive de rire, quand on le chatouille avec, il aime aussi la lumière de son "Luminoux", sa peluche qui brille, mais à nous, il sourit très rarement.

Le docteur était fatigué, son fils de quinze ans avait découché la veille, et il n'avait pas dormi de la nuit, il ne prêta que peu d'attention aux parents, ausculta rapidement l'enfant, et rassura la maman.

-"Tout va bien, ne vous inquiétez pas, il est en bonne santé, certains enfants sont moins réceptifs que d'autres aux stimulis extérieurs, voilà tout."

Mère et enfant rentrèrent chez eux.

Chris avait appelé après John, parce qu'il avait compris que quand on allait voir un monsieur ou une dame en blouse blanche, ce n'étais pas agréable, ils se mettaient devant vous et bougeaient les lèvres très vite, ils vous mettaient des choses dans oreilles, dans la bouche, il fallait que maman vous déshabille, vous rhabille, rien d'intéressant, cela le paniquait énormément.

John l'avait aidé en lui murmurant de douces paroles, et en lui assurant qu'on allait pas le laisser ici, il allait retourner à la maison avec maman.
Chris avait horreur d'être autre part qu'à l'abri, dans sa maison.
Parfois, son papa laissait aller ses doigts sur les touches blanches et noires, quand il posait sa petite main sur le piano, il sentait les vibrations. C'était agréable.

John retourna sur la passerelle.

A l'entrée, les nouveaux arrivants regardaient autour d'eux, l'air béat.
-"J'ai fait du chemin, depuis que je suis arrivé", pensa John.
Assis sur le sable d'une plage qu'il venait juste d'imaginer, John pensa à sa femme, et à son fils.
Il vît John Junior, il était en salle de cours, mais ses pensées était ailleurs.
Presque deux ans s'étaient écoulés depuis que John était mort, et la sollicitude des professeurs de J. j's'était amoindri, pourtant, dans son cœur, la douleur était toujours présente.

J. j'regardait par la fenêtre la cour de son école, il avait treize ans, à présent.
Il s'était mis à penser à son père, s'est pour cela que John, s'était lui aussi mis à penser à lui.
J. j'revoyait les instants passés avec son père, puis il revoyait le jour, où, atteint d'une grippe, il était resté au chaud à la maison.
Ce jour là, il regardait MCM, sur le câble, puis la chanson s'était arrêtée pour un flash spécial.

J. j'avait alors vu les avions s'écraser contre les tours, et en même tant qu'elle, sa vie s'était effondrée, il avait appelé sa mère à son travail, et elle était vite venue le rejoindre.
La femme de John avait appelé le numéro spécialement mis en place, la femme au téléphone lui avait confirmé la mort de son mari.
Ensemble, J. j'et sa mère avaient longuement pleuré.
Cette catastrophe avait fait couler beaucoup d'encre, pendant des mois, on en avait parlé, on ne pouvait plus allumer la télé sans revoir la même scène.
Cela avait tourné en conflit politique entre les Etats Unis et les pays arabes, J. j's'en moquait pas mal, tout ce qu'il voyait lui, c'était que son père était mort, lui et Farah, et Steven, qu'il connaissait bien. Ainsi que tant d'autres.

Le professeur, Miss MacLaren, interpella J. J.
-"Tu peux me dire de quoi nous étions en train de parler, John, demanda t'elle à son fils.
-"La destruction de la forêt amazonienne, lui chuchota John.
-"La forêt amazonienne, répéta J. j'sans réfléchir.
-"Bien, mais essayes d'être un peu plus attentif, répondit Miss MacLaren.
-"Comment j'ai fait pour le savoir ? Se demanda J. J, je n'écoutais même pas."
John sourit, puis se retira.

John fît partir cette plage, Maxence avait presque trois ans, à présent, il était monté sur une chaise et se penchait dangereusement de la fenêtre, John devait l'aider.
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