Extrait du site https://www.france-jeunes.net

Une anecdote parmi d'autres


Je vous plante le décor, je suis coincée à Orly sud parce que mon avion a été annulé à cause d'une des nombreuses grèves. J'ai donc passé toute l'après-midi a attendre le prochain vol, voici une petite anecdote de la fin de mon attente...



Plus tard, j'ai enfin réussi à pénétrer dans la salle d'embarquement. Me voilà assise sur des sièges somptueusement recouverts de tissu bleu molletonné, le grand luxe. Après avoir passé cinq heures sur un vieux machin, "siège" paraît-il, en fer, mon arrière train ne peut qu'apprécier. Autour de moi, des "cravates", jeunes, vieux, enfin plutôt vieux que jeunes. Je prends place sur l'un des somptueux fauteuils, et commence à lire mon bouquin. Alors arrive un jeune "cravate", qui n'en porte pas d'ailleurs. Par "cravate", j'entend personne en costard, avec des escarpins en cuir, riche... Ce jeune "cravate" s'assoie juste à côté de moi. Je n'ai levé la tête que quelques instants, il est plutôt grand, brun, avec des yeux bleus, des escarpins en cuir véritable, un jean noir, une veste de costard sur une chemise, le tout griffé de grandes marques bien entendu, très fashion ! Il n'est en fait que le premier puisque se forme peu à peu dans la salle d'embarquement un troupeau de jeunes "cravates" pendus à leurs portables. Soudain, dans le baraquement de la sécurité où l'on passe les sacs aux rayons X, le ton monte, on entend quelqu'un crier, probablement un vigil un peu trop stressé sur un passager fatigué. Les cris interpellent chacun de nous mais personne ne lève la tête, moi non plus. Alors mon voisin dit :
-Il y des tensions.
Ce à quoi je lui répond, avec l'espoir d'être un minimum comique :
-C'est le stress, la fin de journée.
Raté pour le truc drôle. Il acquiesce. Je sens bien qu'il voudrait continuer la discussion mais je replonge la tête dans mon livre. Alors la même sensation indescriptible parcourt nos deux êtres. Lui cadre, probablement supérieur ou d'ici peu, 25 – 30 ans, séduisant et riche. Moi, lycéenne de 17 ans, portant encore un peu d'innocence enfantine. Le même trouble nous unit. Ce trouble que l'on croira avoir oublié dans deux jours, mais qui restera. Une sensation d'inachevé, d'être passé à côté de quelque chose. Cet échange, qui ne dura qu'une minute, se poursuivra en fait longtemps, chacun a emporté un petit bout de l'autre. Une partie infime, insignifiante, mais tellement perceptible. Parce que parfois, et parfois seulement, un regard et un sourire sont l'aboutissement d'un long ressenti, qu'un échange entre deux êtres s'étale bien au-delà des mots et des sens, il s'étend aux perception, aux atmosphères.
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