Extrait du site https://www.france-jeunes.net

Je suis lâche


Je suis lâche. D'une lâcheté incroyable. Une lâcheté qui m'écoeure... Peu de gens ont le courage d'être lâches devant témoins. [Théophile Gautier]



Je suis lâche. D'une lâcheté incroyable. Une lâcheté qui m'écoeure. Je me lève, je planque mes cernes, mes yeux encore rougis sous une couche de maquillage. Au fond c'est tellement plus simple de tout dissimuler.
Certain ont le courage de regarder leurs sentiments bien en face, ils les affrontent. Moi je choisis la facilité, je cache avec une habilité fascinante le moindre état d'âme. Je ne supporte pas le regard des autres, cette manière qu'ils peuvent avoir parfois de vous observer.

Lorsque tout n'est qu'apparence alors peu importe, ce n'est pas vous qu'ils jugent, mais un personnage créé de toute pièce.
Un personnage à qui l'on voudrait ressembler au fond. Alors pour éviter ce regard gênant, je dégaine ce personnage, ce masque qui vous tient hors d'atteinte, une carapace protectrice.
A coup de sourires, de plaisanteries et de gloussement, on me prend pour quelqu'un de léger, sans soucis. On paraît sûr-de-soi, entouré, bien dans sa peau. Mais voilà à force de sourire à tous bout de champs on a des crampes. A force de crier sur tous les toîts que tout va bien dans le meilleur des mondes, on a la voix qui déraille, la gorge qui se serre, et sans s'en rendre compte les larmes coulent. Toutes celles qu'on a refoulé dans un éclat de rire.


Alors j'ai presque honte, honte de me laisser aller à mes émotions, honte de briser en quelques secondes un personnage pour lequel je finissait par me prendre vraiment. Le regard des autres change, je ne suis plus cet être drôle, plein de vie, insouciant, souriant et amical. Dans tous ses yeux fixés sur moi, la compassion. Terrible, étouffante et blessante.
Réapparaît alors toute la violence. Il faut frapper. J'ai un besoin maladif de hurler au monde que tout va mal pour moi aussi, que moi aussi les choses me touchent, me blessent.

Au lieu de ça, je reste lâche. Je cours me réfugier dans un coin, je frappe fort contre les murs pour évacuer toute cette colère. La colère a un pouvoir effrayant, elle révèle parfois une violence qu'on ne se connaissait pas. Alors à bout de souffle, on se laisse doucement aller à sangloter.
Comme une petite fille, recroquevillée, cachée dans un petit coin sombe. C'est plus facile de redevenir une fillette dans un coin sombre. Et puis pour oublier la douleur, je me relève. Il faut continuer.
Je planque mes yeux rougis sous une couche de maquillage, je serre les dents et je souris. Je suis lâche, d'une lâcheté incroyable, une lâcheté qui m'écoeure...
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