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A la recherche de l'amulette (chapitres 16 à 20)

Voici la suite de mon texte "A la recherche de l'amulette"...


Chapitre 16

Il se tenait au devant d'une maison éclairée et animée. De la musique s'échappait par la porte entrouverte. Des mortels sortaient plus ou moins ivres de cette demeure. C'était une grande bâtisse relativement ancienne. Je m'approchai de Jens à pas de loup et murmurai à son oreille :
Veux-tu aller danser ?
Il se retourna très surpris et me dit :
Non, je n'aime pas danser. Comment as-tu fait pour venir jusqu'ici ?
Ça c'est un des secrets que je viens juste de découvrir. Que fais-tu ici alors que tu n'aimes pas danser ?
Je n'en comprends pas l'intérêt mais j'aime regarder des personnes insouciantes. Et je me dis qu'un jour tu pourras te montrer au grand jour et que ce jour là tu auras une magnifique surprise.
De quel genre ?
Ah ! Ça, tu le verras quand le jour sera venu.
Ne laisse pas tant de mystère dans l'air. Ton enfant me fait souffrir.
Comme j'aimerai le voir naître bientôt !
Ce temps arrivera vite, je le sens.
Nous rentrâmes, la main dans la main. Nous étions plus loin de l'hôtel que je le pensais. Les autres clients me regardaient étrangement. C'était sûrement dû à ma pâleur cadavérique ainsi que la cape. Si seulement ils savaient... La simple évocation du mot "vampire" les faisaient trembler. Je leur jetai un regard noir et montai l'escalier. En entrant, Lora était assise à la table et lisait le journal.
Quelques rumeurs courent sur toi dans l'hôtel
C'est à dire ?
On te sait étrange et on te dit le Diable en personne.
Si jamais tu entends encore ce genre de bruit, dis leur que le Diable ne conçoit pas d'enfant comme les mortels.
Tu ne crois pas qu'il faudra plutôt quitter l'hôtel ?
Il en est hors de question.
Cela dit, j'allai me coucher. Ainsi en plus d'être ignorant, les mortels médisaient dans mon dos ! Je devais faire abstraction de ce genre de commentaires terre à terre et me concentrer sur la tâche qui m'attendait. Je me mis donc au lit. En plein milieu de la nuit, une douleur m'arracha de mon sommeil et me déchira les entrailles. La souffrance me fit pousser un cri. Jens et Lora se précipitèrent dans ma chambre et j'entendis Lora hurler"Appelle un médecin de toute urgence". Ce fut-il possible que ce soit le moment ?


Chapitre 17

De nouveau un spasme me fit hurler. Une souffrance sourde envahissait mon corps. Je cherchai dans les ténèbres de la douleur, la main de Lora. Je la serrai de toutes mes forces espérant que cela ferait passer le mal que je subissais. Le temps me parut long jusqu'à l'arrivée de mon sauveur. J'aurai aimé que ce soit une femme mais je devais accepter le destin. Le médecin me mit des compresses d'eau froide sur le front en me disant de respirer doucement. Je ressentais la douleur de plein fouet. Le médecin fut consterné par la pâleur de mon visage. Il reprit son travail tout en m'observant. Je sentais le sang qui inondait mon lit. Au bout d'efforts interminables, j'entendis enfin les hurlements de ce petit bout d'homme que je venais de mettre au monde. J'avais peur de le toucher. Était-il comme moi ? Je voulais qu'il soit comme les autres enfants mais cela me troublait en même temps. Je craignais sa réaction lorsque qu'il se verra vieillir avec ma jeunesse. Il ne fallait plus que je pense à cela. Je me faisais une fois de plus du mal pour rien. Jens s'approcha de moi, mit une main sous ma nuque humide de sueur. Je voyais trouble et ne distinguais aucun objet clairement. Les paroles semblaient me parvenir de très loin. Sombrant dans un délire noir, mes yeux se fermèrent et ma conscience pénétra dans mes rêves couleur ébène.
Lorsque j'ouvris enfin les yeux, mon premier réflexe fut de tourner la tête pour voir où était le berceau. Je le découvris enfin.
Un couffin blanc entouré d'un voile blanc aussi. Je me relevai sur un coude et observai l'enfant, mon enfant, David. Il ressemblait à un ange, ses petites mains s'étaient refermées sur le drap. Un ange endormi à côté d'un démon éveillé. Tout était en douceur chez lui. Le fin duvet de ses cheveux était pareil à une auréole, ses joues roses brillaient d'un éclat semblable à la douce lumière d'un coucher de soleil. Il remua faiblement puis se calma. J'étais torturée entre le prendre dans mes bras et le laisser en paix. Le sommeil d'un enfant est si précieux que je dus me faire violence pour ne pas le troubler. Je me levai et m'habillai tout en le regardant. Au moment où j'allai sortir de ma chambre, j'entendis mon bébé pleurer. J'accourus presque au berceau et le pris dans mes bras. Il était si léger et j'avais peur de le faire tomber car je me maîtrisais mal en cet instant. Tout mon corps tremblait d'émotion. Sûrement alertés par le cri de l'enfant, Jens et Lora se précipitèrent dans la pièce. Jens me regarda d'un air touchant. Lora voulu prendre le bébé, je la laissai faire. N'était-elle pas une sorte marraine pour mon enfant ? Jens en profita et m'emmena à l'écart.
Maintenant que tu es mère, ne voudrais-tu pas faire de moi ce que tu es ?
Tu ne sais pas ce que c'est de ne jamais voir la lumière du soleil, de devoir aspirer la vie d'autres, de ne pas être considéré comme les autres, de vivre caché !
Justement j'aimerais beaucoup comprendre, te comprendre. Il y a quelque chose de magique chez toi et j'aimerais savoir ce que tu ressens. Si tu veux mon bonheur alors transforme-moi. Je connais ta personnalité et je souhaiterais être un vampire.
Tu ne sais même pas ce que tu me demandes. Je n'ai jamais transformé quelqu'un et je ne veux pas le faire. Quand j'étais encore une mortelle, je voyais les vampires comme toi mais maintenant je me rends compte de mon erreur. Je ne veux pas que tu vives ce que je vis en ce moment. Et que deviendra notre enfant si, toi aussi, tu succombes à cette folie meurtrière ? C'est un véritable suicide et tu ne prends pas la mesure de la chose.
C'est toi qui ne me comprends pas. Je veux être comme toi, je veux être toi.
Si tu m'aimais, tu ne ferais pas ça.
C'est justement parce que je t'aime que je te demande ça. Je te le demande de tout mon cœur.
Qu'est ce que ça t'apportera de plus de me ressembler ? Toi, Lora et maintenant David, vous êtes ceux à qui je tiens le plus. Et tu voudrais que je te tue, que je t'assassine ?
Cela ne sera pas un assassinat puisque c'est moi qui te le demande. Fais le au moins parce que tu m'aimes.
C'est justement parce que je t'aime que je ne veux pas que tu deviennes comme moi.
Sache que si ce n'est pas toi qui le fais, je trouverai bien un autre vampire pour me transformer.
Bon, très bien, fis-je piquée au vif, je vais le faire mais je ne garantis rien.


Chapitre 18

Ce qu'il ignorait, c'est que je ne savais pas comment il fallait si prendre pour transformer quelqu'un. Je n'avais aucun souvenir de ce qu'Eligor m'avait fait. Je suivis mon instinct et le mordis à l'endroit stratégique : le cou. Peut-être fallait-il le vider de son sang et lui donner le mien à boire. C'est ce que je décidai de faire. Doucement, mes canines pénétrèrent dans sa chair tendre et sucrée. Son corps se tendit au maximum puis se relâcha jusqu'à ressembler à une poupée de chiffons. A travers mes dents plantées, je ressentais les battements de plus en plus faibles de son cœur. Il ralentit et s'éteignit.
Ce fut à ce moment là que le mien commença à s'accélérer. A toute vitesse, je me mordis le poignet et laissai tomber quelques goûtes de mon sang sur ses lèvres. J'appuyais mon poignet contre sa bouche mais rien ne se produisit. Je fis une entaille plus grande et le sang coulait maintenant à flot sur ses lèvres. Aucune réaction. Le cœur serré, je tentai de l'embrasser tout en sachant qu'au fond de moi, il était mort. Je l'avais tué. Une fois de plus, un homme était mort par ma faute. Des larmes se mirent à couler sur son corps. Je le tenais serré contre moi en espérant que la pauvre chaleur que je dégageais suffirait à le ramener à la vie. Un grand vide s'installa dans le cœur de la meurtrière. A présent, je pleurai toutes les larmes de mon corps. Lora entra à ce moment et me vit à genoux sur le corps de Jens. Un cri lui échappa puis se fut au tour des larmes. Nous pleurâmes ensemble pendant quelques minutes puis elle se releva et m'obligea à faire de même. De mon plein gré, je l'écoutai.
Occupe-toi de ton enfant pendant que je m'occupe de ce qui reste de Jens.
Je m'approchais du berceau et contempla ce qui restait de notre amour. Plus je l'admirais, plus les larmes me montaient aux yeux. Je ne pus immédiatement me résoudre à le prendre dans mes bras. De loin, j'entendais Lora s'affairer. Je ne voulais pas savoir ce qu'elle faisait. Enfin, je pris mon enfant contre mon cœur avec une lenteur effarante. Il ne sentit même pas que je le soulevais. Ce fut mon cœur affolé qui lui fit ouvrir les yeux. Ils étaient de la même couleur que ceux de son défunt père. Il ne fallait pas que je sombre dans la déprime. Il m'avait demandé de le transformer et la transformation est pire que la mort elle-même. On est mort sans l'être vraiment. Il valait mieux qu'il en soit ainsi. J'essayais de me déculpabiliser comme je le pouvais. D'une intention lointaine, je m'occupais de mon bébé. Lora vint à moi et me prit la main :
Ce n'est pas de ta faute.
Ces simples mots suffirent pour déclencher un torrent de larmes.
Si tu n'avais pas cédé à son désir, il l'aurait fait faire par quelqu'un d'autre.
J'aurais dû lui dire que je ne savais pas m'y prendre.
Tu crois que cela aurait changé quelque chose. Il valait mieux que ça finisse ainsi. Tu penses que tu aurais supporté de le voir comme toi ? Un être entre la vie et la mort qui cause cette dernière. Il l'aurait regretté et il n'y aurait eu aucun moyen de le sauver. L'amulette ne marche que pour une personne.
Je n'ai plus aucune raison de la cherche à présent. Elle ne me sert plus à rien désormais. Demain, j'irai admirer le soleil pour la dernière fois et je mourrais sous ses rayons.
Penses-tu à ton enfant quand tu dis cela ?
Justement j'y pense trop. Crois-tu qu'il mènera une vie normale à côté de moi ? Crois-tu qu'il sera heureux auprès d'une mère qui ne peut voir la lumière du jour ?
Sans mère, penses-tu qu'il sera mieux ?
Tu remplieras cette tâche à merveille. J'ai vu comment tu t'occupe de mon enfant, il sera mieux avec toi qu'avec moi.
Une gifle retentissante atterrit sur ma joue. C'était la première fois que l'on me gifla. Lora était rouge de colère devant moi.
Tu resteras en vie et tu t'occuperas de ton enfant et de ta quête.
Je restais bouche bée, surprise du ton qu'elle venait d'employer et de ce qu'elle venait de faire. À son regard, je devinai que je n'avais pas le choix et que je devrai continuer à vivre. Comme si le mot vivre avait encore un sens pour moi ! J'avais l'impression de ne plus servir à rien. Je n'avais plus la force de penser, plus la force de me nourrir, plus aucune force. Mon seul secours fut les larmes qui continuèrent de couler en abondance. Je ne pouvais même pas avoir l'espoir de racheter ma faute, tant elle était immense. J'avais tué les deux hommes qui pouvaient me soutenir. Et les deux étaient morts par ma stupidité. Combien de victimes ferais-je encore ? Je ne voulais pas faire souffrir mon bébé ni Lora. Pourtant il fallait que je continue. J'avais survécu aux différentes épreuves que l'on m'avait imposées donc je ne pouvais renoncer à la vie maintenant.
Mon regard se porta sur la nuit qui apparaissait à la fenêtre. Depuis que je m'étais éveillée, je n'avais pas porté le regard au dehors. Il neigeait. Un épais voile de coton blanc couvrait les rues. Je pris un manteau en fourrure dans la penderie de ma chambre, prévins Lora de ma sortie et partis de l'appartement. Je savais que le froid ne m'atteindrait pas mais pour paraître comme les autres, j'avais pris un manteau. Toutes les personnes que je croisais avaient le visage et les mains bleuis par le froid glacial que suscitait la neige. Le temps de Noël était proche et toutes les vitrines avaient revêtu leurs plus belles parures pour cette fête exceptionnelle. Les arbres étaient décorés de guirlandes multicolores. Tout le monde semblait heureux et j'avais l'impression d'être en désaccord avec tout ce bonheur. Les enfants étaient de sortie pour admirer les décorations. Les cafés servaient du vin chaud. Cela faisait bien longtemps que je n'en avais pas bu. Comme un coup de folie, ce délicieux breuvage aux pouvoirs enivrants me fit envie et me poussa à entrer dans l'un de ces cafés surpeuplés. Alors que je poussai la porte, tous les regards se posèrent sur moi. Pourquoi ? Ignorant les chuchotements et les remarques, j'allai m'assoire à une table vide qui semblait m'appeler. Sans attendre, un serveur s'approcha de moi et me demanda ce que je souhaitai commander. N'écoutant que mon désir, je lui réclamai ce vin chaud qui me faisait tellement envie. Le café était plein de sa douce saveur. Les clients étaient de bonne humeur, certains l'étaient un peu trop. Au-dessus de nos têtes, un épais nuage de fumée provenant des pipes flottait comme un spectre de mort. Je me maudissais d'avoir de telles idées noires en pleine période de réjouissance. Le serveur fut prompt à apporter ma commande. Il posa la tasse fumante sur la table et me demanda si je voulais autre chose. Je répondis par la négative et payai le vin chaud. La tasse était brûlante et je dus m'y reprendre à plusieurs fois avant de sentir le breuvage fumant sur mes lèvres. Tout en buvant, j'observais les autres à la dérobée. Beaucoup de personnes me regardèrent d'un air étrange. Partout où j'étais, on me suivait du regard. Qu'avais-je de si étrange ? Même lorsque j'essayai de passer inaperçue, on me faisait sentir ma différence. Les flocons tombaient de plus belle dehors. Les gens s'emmitouflaient dans leurs manteaux et certains glissaient sur les plaques de verglas. Des sourires apparaissaient sur les visages à la vue de ce spectacle. Quelques enfants sortaient leurs luges sous le regard attendri de leurs parents. Ils semblaient pouvoir les admirer pendant des heures entières. C'est à ce moment-là que je pensais à mon fils. Peut-être qu'un jour, je l'emmènerai au milieu de cette foule d'enfants normaux. Je me voyais déjà en pleine discussion avec d'autres mères, plongée dans le babillage maternel. Pourtant, je ne voulais pas leur ressembler. Je ne voulais pas devenir l'une de celles qui croit que son enfant est parfait, qu'il a toujours raison et qu'il vaut mieux que les autres. J'avais peur de ressembler à ça. Je souhaitais lui donner une éducation simple sans lui parler de son père. Lorsqu'il évoquera le sujet, je dévierais vers autre chose. Même si j'étais une meurtrière, je ne voulais pas qu'il sache que c'est moi qui l'ai tué. C'était pour lui, et uniquement pour lui que je continuais ma quête. Une voix me sortit de mes pensées :
Puis-je vous offrir un verre, jeune demoiselle ?
Un homme d'âge mûr venait de prendre la place libre de ma table sans m'en demander la permission. Je détestais cela. Pensant qu'il ferait un bon repas, je lui répondis en souriant :
Volontiers.
Il commanda deux tasses de vin chaud et commença à me raconter sa vie. Il se plaignait de n'avoir personne avec qui fêter Noël. Il dévia sur sa femme partie avec un autre, ses enfants qui avaient préféré la douceur d'une mère à la discipline du père. Pendant qu'il restait là à jacasser inutilement, je pensais à la façon dont j'allai le charmer et le mordre. Quand nos verres furent vides et que les clients s'en allèrent, il me proposa de me raccompagner chez moi. Il m'a dit avoir peur qu'une jeune femme aussi jolie que moi ne se fasse agresser. Nous sortîmes ensemble du bar et je l'emmenai dans une ruelle sombre et étroite. Nos pas laissèrent des traces profondes dans la neige immaculée. Je souriais intérieurement. Si seulement il savait comment il finirait ! Mais il ne s'en doutai même pas. Il croyait que j'allais me laisser faire comme une gentille petite fille. Il ne connaissait ni ma puissance ni mon pouvoir. Comme il était attendrissant avec ses gestes affectueux ! Il me prit dans ses bras, histoire de me réchauffer. Je posai ma tête sur son épaule. Sa chair blanche était si tentante. Il pressa ses lèvres contre les miennes. Je commençai à l'embrasser tendrement. Ma pression s'accrut, mes canines pénétrèrent ses lèvres. Il tenta de se dégager mais je le serrai si fort qu'il ne pu y parvenir. Il gémissait et je me régalai. Je sentais le sang couler entre nous, je l'entendais presque goutter à terre. Il coulai en moi, délicieux. Cela faisait longtemps que je n'avais pas tué quelqu'un de quelconque. Avant le dernier battement de cœur, je le relâchai. D'un coup de langue, j'essuyai mes lèvres. Je ne voulais pas perdre la moindre goutte. Mes yeux se portèrent sur le sol. Le sang d'un innocent avait tâché la blancheur immaculée de la neige. Innocent mais coupable. Coupable d'avoir essayé de me séduire, coupable d'avoir raconté sa vie à n'importe qui. Coupable parce que je l'avais décidé. Sur ce, je rentrai à la maison. Le soleil ne pointait pas encore mais la lune disparaissait peu à peu. Le ciel, bleu foncé, était parsemé de nuages légèrement roses et orangés. La neige au sol avait une couleur féerique. Là où personne n'avait marché, elle restait d'un blanc pur. Et là où la foule avait piétiné, la neige se transformait en boue. Toute la nuit, j'avais laissé mon fils à la garde de Lora. Je lui faisais assez confiance pour s'occuper de lui. Lorsque je poussai la porte d'entrée, elle m'accueillit en me disant que le petit venait de s'endormir. Elle plaisanta en me disant qu'il calquait ses heures en fonction des miennes. Il était encore trop tôt pour le savoir. Un nouveau-né ne fait que dormir et manger pendant ses premières semaines de vie. Je le contemplai dans son berceau. Des larmes me montèrent aux yeux. J'avais tué son père. Je partis et allai lire les livres sur l'amulette. J'avais assez perdu de temps comme cela, il fallait que je le rattrape.


Chapitre 19

J'ouvris le premier livre qui me tombait sous la main. Les notes que j'y avais apposées me sautèrent aux yeux. Une feuille avait été rajoutée. Le plan de la cachette y était dessiné. Le chemin tracé était flou et on en distinguait mal les traits ainsi que les noms. Tout me confirmait l'endroit où se cachait l'amulette : la Forêt de Fontainebleau. A une dizaine de kilomètres de moi se trouvait le bijou qui mettra fin à mon calvaire. Arriverais-je à le retrouver ? Aurais-je la force d'aller jusqu'au bout ? Les lignes du livre se brouillèrent devant mes yeux. Le sommeil voulait s'emparer de moi. Il y parvint alors que je luttai pour garder un minimum de lucidité. Ma tête devint lourde et plongea entre les pages. Ce fut l'inconfort de ma position qui m'éveilla. Lentement, je pris le chemin de ma chambre. Assise sur le lit, j'observai de nouveau l'enfant qui dormait paisiblement. Je me penchai pour l'embrasser, il eût un sursaut. Bien que je sache que c'était de surprise, j'eus peur que ce frisson ne soit de terreur. Il ne pouvait pas encore avoir peur de moi. Il était trop jeune pour comprendre mais si je devais faillir à ma mission, il faudrait l'éloigner de moi. Je m'allongeai entre les draps frais et le sommeil fit son travail. Le lendemain soir, ce fut Lora qui me réveilla. Mon bébé n'était pas à côté de moi. Je me rendis dans ce qui servait de salon. David était dans les bras de Lora et elle le nourrissait. Comme elle était attendrissante avec un bébé dans les bras ! Tout haut, je formulai ma pensée :
Dis-moi, quand te décideras-tu à avoir ton enfant ?
Pour cela, il faudrait déjà un homme et pour l'instant ce n'est pas ma principale préoccupation et je pense qu'avec le tien et toi c'est largement suffisant non ?
Si tu le dis !
Elle me tendit l'enfant. Je le pris dans mes bras, il s'accrocha fermement à ma chemise de nuit. Je le serrai contre moi. Je le conduisis dans son berceau afin que je m'habille. Je choisis une robe chaude pour affronter le froid hivernal. J'habillai ensuite mon petit. De ma chambre, je demandai à Lora d'en faire autant. Tous trois, nous sortîmes de l'hôtel. Nos pas crissaient sur la neige encore présente. David faisait sa première rencontre avec la précieuse blanche. Je le posai à terre. Il se mit à quatre pattes sur le sol. Il semblait ne pas sentir le froid. Peut-être avait-il hérité de mon insensibilité au froid. Je le repris dans mes bras puisqu'il ne savait que ramper. Je ramassai son écharpe et nous entrâmes dans un magasin de jouets. Aussitôt, David tendit les bras vers un ours en peluche. Le jouet était aussi grand que lui. Je n'avais jamais fêté Noël mais ce n'était pas une raison pour en priver mon enfant. Je voyais ses yeux pétiller de joie quand je pris l'ours sur l'étagère. Le visage du commerçant se fendit d'un large sourire lorsque je sortis de ma poche une liasse importante de billets. David prit l'ours dans ses bras et le serra avidement. Lora nous regardait aussi en souriant. Tout le monde semblait se réjouir de cette fête. Au dehors, les gens étaient amassés devant les devantures éclairées aux bougies.
S'ils continuent à fixer les vitrines ainsi, ils vont finir par s'enraciner ! S'exclama Lora.
Ou hypnotisés par les bougies !
Nous partîmes toutes les deux dans un éclat de rire foudroyant. Pour la première fois depuis la mort de Jens, je riais. Comme mon enfant avait reçu son cadeau de Noël, il était hors de question que Lora n'ait pas le sien. Je lui mis de force mon bébé dans les bras en l'obligeant à s'éloigner. Elle fut surprise mais accepta. Je fis immédiatement demi-tour et m'engouffrai dans un magasin de vêtements. Mon regard se posa immédiatement sur une robe bleu nuit avec des dentelles blanches le long du décolleté, sur le bout des manches longues et sur le bas. Du fil d'or courait autour de la taille dessinant de jolies roses tout en remontant sur la poitrine. Cette robe, je le devinais, faisait la taille fine et irait parfaitement à Lora. Je la pris et la déposai sur le comptoir. L'homme qui était derrière me félicita du choix et me dit le prix sur un ton gêné. Qu'importe le prix, elle me plaisait. Je payai et partis. En sortant du magasin, un homme me bouscula. Je n'eus pas le temps de le regarder en détail mais sa façon de marcher me rappela quelqu'un. Il avait le visage ravagé, malgré cela je savais que je le connaissais. Il s'était arrêté en me voyant mais je n'avais pas le temps de rester. Lora m'attendait à la boutique de jouets et je lui avais dit que je n'en avais pas pour longtemps. Presque en courant, je la rejoins. Elle me questionna sur le paquet que j'avais dans les mains :
Aurais-tu, encore une fois, été atteinte d'une crise dépensière ?
Non, du tout. Rentrons, je n'ai pas envie que David attrape froid.
Nous prîmes la direction de l'hôtel. Tout le long du chemin, Lora me posa des questions sur le contenu du sac. Je ne lui répondis pas, souriante. Arrivés dans la chambre, je la fis asseoir quasiment de force sur le canapé et lui donnai le paquet. Elle parut surprise :
Il ne fallait pas ! Je n'ai rien prévu !
Ce n'est pas grave. Tu y penseras une prochaine fois.
Elle ouvrit enfin et au fur et à mesure qu'elle découvrait la robe, ses yeux s'agrandissaient de surprise. Quand elle l'eût tout à fait découverte, elle poussa un cri d'étonnement et me sauta au cou. Elle courut dans sa chambre afin de l'essayer. Elle en ressortit rayonnante. Elle tourna sur elle-même et se mit devant le miroir. Elle s'admirait et je le trouvais de plus en plus belle. Elle était rayonnante pendant le dîner. Mon fils dormit dans le berceau que j'avais mis à côté de moi.


Chapitre 20

Une fois le repas finit, nous nous installâmes sur le canapé.
Il faudrait se rapprocher du sanctuaire. Sur place, nous trouverons peut être plus d'informations.
Tu crois que ton fils supportera un aussi long voyage ?
Il le faudra bien. Maintenant que Jens est mort, c'est uniquement pour lui que je fais cela.
Pendant que nous discutions, quelqu'un vint sonner à la porte. Je me levai du canapé et allais ouvrir. Il n'y avait personne et, au moment où j'allais fermer la porte, mon regard se posa sur le sol. Un bouquet de roses fanées y était posé. Des roses rouges dont les pétales avaient virés au marron, les tiges étaient raidies comme un corps mort, les feuilles cassantes tombaient à terre et les épines traversaient la peau de mes mains. Qui pouvait bien avoir déposer ces fleurs pourrissantes ici ? Dans les roses, se trouvait une lettre dont l'écriture était vacillante et appuyée, par endroit le papier était troué. Je pouvais presque lire au travers. Je le pris dans mes mains tremblantes. Quelqu'un avait inscrit :

Tu croyais te débarrasser de moi en me tuant ? Malheureusement pour toi, le processus de transformation a réussi. Mon amour pour toi s'est transformé en haine à cause de cela. Si tu souhaites me séparer de mon enfant, sache que tu n'y arriveras pas. Je l'enlèverai à une mère meurtrière. Et je m'efforcerai de faire échouer ta quête. N'essaie pas de me fuir, cela ne te mènera à rien.
Jens...

Mon cœur fit un bond en découvrant la signature.

Ainsi il était toujours en vie ! Une brusque sensation de froid s'empara de moi, je m'affalai sur le sol. Des cris me parvinrent dans ma lointaine inconscience. Lora. Revenue à moi, elle me demanda :
Que s'est-il passé ?
Jens... Il est revenu.
Ce n'est pas possible, tu l'as tué et je me suis débarrassé de son corps.
Lis la lettre, je ne sais pas comment cela est possible.
J'aurai juré qu'il était mort pourtant.
Il semble qu'il ait ressuscité.
Ce n'est pas possible. Il était mort.
J'ai peur Lora, j'ai peur qu'il ne s'en prenne à David ou à toi.
Tu oublies qu'il est moins puissant que toi. Il ne peut pas connaître ce que tu as appris en tant d'années.
Malgré ce qu'elle me disait, je craignais toujours autant de le revoir. Pourquoi me détestait-il ? C'est lui qui a voulu devenir comme moi. Cependant, il ne pouvait pas se mettre en travers de mon chemin. Je le tuerai de nouveau s'il le faut. Quant à David, je ne le laisserai pas le toucher, même s'il est aussi son fils. Il était avant tout le mien puisque avec sa volonté de devenir vampire, il était "mort"
Mon reflex immédiat fut de vérifier qu'il était toujours dans son berceau. La voix de Lora me parvint du couloir : "Il faut immédiatement quitter cet hôtel, je descends à la réception pour avoir la liste des autres hôtels."
Tu oublies qu'à cette heure, il n'y a plus personne.
C'est vrai. Je n'avais pas la notion du temps. Je te promets que demain à l'aube, j'irai me renseigner.
Pour l'instant va te coucher.
Non, je veux reste avec toi.
Ne t'inquiète pas, je joue un peu avec David et ensuite je vais me coucher.
Elle alla dans sa chambre pendant que j'admirais mon enfant. Je me rendis compte à quel point il avait grandi. Est-ce qu'il se rendait compte de ce qui se passait autour de lui ? Se rendait-il compte de mon état ? Rien ne semblait pouvoir troubler son sommeil. Pourtant c'était pour lui que je me battais, c'était pour lui que son père revenait. Je le pris dans mes bras et me couchai avec lui. Le lendemain soir lorsque je me réveillai, Lora me tendit un papier sur lequel étaient inscrits plusieurs noms.
Voici tous les hôtels dans les environs de la forêt de Fontainebleau.
T'ont-ils donné les horaires de départ ?
Il y a deux départs par jour. Le matin vers neuf heures et le soir à vingt heures.
Il est trop tard pour celui de ce soir. Demain soir te convient ?
C'est préférable pour toi.
Je prépare ma valise.
Une fois de plus, nous devions partir. Je me demandais si j'arrivais un jour à avoir un endroit à moi. Vivre dans un hôtel ne me déplaisait pas mais devoir subir les remarques des autres clients m'était insupportable. De plus, mes "meurtres" ne passaient pas inaperçus. Je confiais mon enfant à Lora. Il y a bien longtemps que je n'avais pas fait de repas humain. Je me sentais plus faible et j'étais moins apte à nous défendre. Il me fallait du sang. Noël était passé et c'était le jour du Nouvel An. Peu de gens sortaient à cette époque. Comme d'habitude, j'allai m'installer dans un bar où les hommes et les femmes sans famille se rendaient. Il était simple de leur faire croire que j'étais comme eux. Je m'installai sur une petite table près de la vitrine d'où je voyais toute la salle. C'était un bar où je ne m'étais jamais rendue. Il était à quelques mètres de l'hôtel. Les gérants l'avaient décoré de façon à ce qu'il soit convivial. Les clients devaient se sentir chez eux. À l'opposé du comptoir, se trouvait une cheminée avec un rebord en bois garni de différentes sortes de pots et de cadres photos où des visages inconnus souriaient. Un feu y brûlait comme pour réchauffer les âmes refroidies. Au plafond, des poutres en bois de couleur sombre supportaient le crépit jauni par le feu. De multiples bougies blanches éclairaient cette salle sur un lustre en verre. La clientèle devait avoir entre vingt et trente ans. En voyant cela, j'essayais de me souvenir de l'âge que j'avais réellement. Je n'y parvins pas. Tant d'années s'étaient écoulées depuis ma rencontre avec Eligor. Physiquement, j'avais toujours seize ans. Cela était un inconvénient pour moi mais aussi un avantage. Les hommes venaient plus facilement vers moi. Pendant que je rêvassais, un jeune venait vers moi. Je mis du temps à m'apercevoir qu'il était un serveur. Il m'apportait un verre de couleur semblable au vin. Il m'annonça qu'il m'était offert par l'homme au comptoir. Mon attention se porta dans sa direction. Au premier regard je sus qu'il était des nôtres. Il avait le teint pâle et ses yeux l'étaient aussi. Il portait une cape noire doublée de rouge, il semblait plus vieux qu'Eligor. Je trempai mes lèvres dans le verre et je me rendis compte que c'était du sang. En regardant dans sa direction, il me montra ses poignets ensanglantés. Je ne connaissais rien de cette coutume mais je devinais que cela représentait un énorme sacrifice pour lui. Pendant que je rêvassais, un jeune venait vers moi. Je mis du temps à m'apercevoir qu'il était un serveur. Il m'apportait un verre de couleur semblable au vin. Il m'annonça qu'il m'était offert par l'homme au comptoir. Mon attention se porta dans sa direction. Au premier regard je sus qu'il était des nôtres. Il avait le teint pâle et ses yeux l'étaient aussi. Il portait une cape noire doublée de rouge, il semblait plus vieux qu'Eligor. Je trempai mes lèvres dans le verre et je me rendis compte que c'était du sang. En regardant dans sa direction, il me montra ses poignets ensanglantés. Je me décidai à aller à sa rencontre. Je m'assis à sa table et lui demandai :
Pourquoi ce présent ?
Pour vous faire comprendre que vous n'êtes pas la seule vampire ici.
Je ne cherche pas à faire d'autres connaissances "vampiriques". *
Pourtant nous sommes plusieurs à arpenter les routes de France dans le but de rassembler le maximum de personnes comme nous.
Votre recherche a-t-elle un but précis ?
La revanche.
Quel genre de revanche ?
Une sorte de Jihad contre les humains. Il est temps que nous nous vengions de ce qu'ils nous font subir.
Je ne vois pas en quoi ils nous sont maléfiques puisque ces humains que vous haïssez vous sert de nourriture. Je ne suis pas intéressée par votre offre et le fait que vous m'ayez offert votre sang ne me décidera pas davantage. Je vous souhaite une bonne soirée en espérant que vous trouverez quelqu'un pour vous suivre.
Je ne finis pas mon verre et me levai. Il avait sûrement compris que je ne voulais rien de lui. Il était peut-être dans le même cas que moi. Peut-être avait-il été mordu trop tôt et n'avait reçu aucun enseignement. Je ne voulais pas l'aider car cela me créerait plus de problèmes que je n'en avais déjà. Le chemin du retour me parut plus long qu'à l'ordinaire. Lorsque je pénétrai dans l'hôtel, Lora s'était endormie sur le canapé. Je la réveillai en la secouant doucement :
Gabrielle ! Je croyais que tu nous avais abandonnés.
Et pourquoi le ferais-je ?
Je n'en sais rien.
Je vais préparer les affaires de David et les miennes.
Je l'ai déjà fait en t'attendant.
C'est très gentil, merci.
Ton fils n'a pas arrêté de pleurer et j'ai eu un mal fou à le calmer. Je crois qu'il sait quand tu vas tuer.
Je n'ai fait aucune victime aujourd'hui. Je n'en avais pas envie.
Ce n'est pas étonnant vu les circonstances. Je n'ai pas beaucoup d'appétit non plus.
Je n'ai pas dit que je n'avais pas bu, j'ai dit que je n'avais pas tué.
Comment est-ce possible ?
Un vampire était dans le même café que moi et il m'a offert un peu de son sang dans un verre.
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- Jens ?
.
- Non, ou alors il était en bonne santé.
.
- Tu as accepté ?
.
- Tu me crois vraiment folle. Boire c'est s'engager, hors j'ai compris la leçon maintenant.
.
- Je te comprends. J'aimerai beaucoup continuer cette conversation mais il faut se lever demain soir donc je propose qu'on aille se coucher.
- Tu as raison. Je m'occupe de mon fils et je vais me coucher.
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Publié le 04 juin 2005
Modifié le 08 mai 2005
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