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La vérité sur le trafic nucléaire

Avec l'effondrement du bloc communiste en Europe de l'Est, le monde est entré dans un état de désordre nucléaire difficilement contrôlable. La menace existe même si le trafic demeure aujourd'hui limité à quelques escros ou petits amateurs qui, pour des milliers de dollars, vendent du plutonium ou de l'uranium.


Panique à Munich : le 12 août 1994, à l'aéroport de la ville, des policiers viennent en effet de saisir 363 grammes de plutonium de qualité militaire (Pu 239) sur des passagers en provenance de Moscou. 363 grammes ? Situons d'abord la gravité de l'affaire. Selon les experts, l'inhalation de plutonium 239 peut provoquer un cancer du poumon ; celle de quelques milligrammes, une mort rapide. Et les radiations du plutonium restent toxiques (à l'air libre) au-dellà de 20000 ans.
Dans le vol Lufthansa Moscou-Munich, ce jour-là, ce sont deux Espagnol et un Colombien qui transportent l'échantillon - soigneusement protégé. Rapidement, ils avouent qu'ils escomptaient vendre à un mystérieux intermédiare européen 4 kilos de plutonium pur pour 276 millions de dollars ; et qu'ils avaient aussi en "stock" du lithium 6, le principal ingrédient fissile de la bombe à neutrons.
Il faut au minimum 5 kilos de plutonium 239 pur à plus de 90% ou 21 kilos d'uranium 235 (U 235) pur à plus de 80%. Faute d'undispositif spécial en béryllium, de très haute technologie, il faut 23 kilos de Pu 239 très pur, ou 66 kilos d'U 235.


Une simple mise en scène

Sur le champ, le chancelier KOHL élève la voix et exige des autorités russes qu'elles mettent fin au trafic de substances nucléaires qui s'effectue, dit-on en Allemagne, à peu près au grand jour dans l'ex-Union soviétique. En Europe occidentale, l'émotion est également considérable et tous les médias consacrent de longs développements à la "mafia nucléaire" soviétique. Moscou parle de provocation, mais l'opinion européenne n'attche guère de prix à ces protestations. Chacun sait - ou croit savoir - que le gabegie règne à Moscou. Alors...
Alors, huit mois plus tard, l'hebdomaire allemand Der Spiegel fait une révélation sensationnelle : l'affaire du plutonium de Munich est "bidon". C'est une pure et simple mise en scène du service allemand de contre-espionnage, le Bundes Nachrichten Dienst, ou BND. Baptisée "opération Hadès", la provocation avait pour but de sensibiliser l'opinion allemande au danger du trafic nucléaire. Une leçon de choses un peu poussée, en sorte. Mais l'opposition allemande va plus loin : pour elle, "Hadès" magnifiait le chancelier KOHL, paladin de la sécurité nucléaire, dans le contexte d'une campagne électorale difficile - et dans un pays très "vert", où l'atome est l'objet d'une véritable phobie publique...
Depuis, démentis, protestations d'innoncence, accusations croisés, exigences de démission volent bas entre Bonn et Munich - fédéralisme oblige. Mais la conviction qu'exprimaient discrètement les experts des services spéciaux français, à savoir que l'essentiel des cas de trafic de substances nucléaires connus, en direction de l'Allemagne, résultaient de provocations, en a encore été renforcée.
L'affaire de Munich signifie-t-elle pour autant que la menace de trafic nucléaire est nulle ? Non, évidemment. Elle démontre seulement que certains officiels, s'ils sont animés des meilleures intention du monde, n'en ont pas pour autant intégré la morale de la célèbre histoire du petit garçon qui criait au loup. Le péril est cependant bien là et il n'est pas exagéré de dire que, depuis la fin de la guerre froide - donc de l'ordre bipolaire - le monde est en état de désordre nucléaire.
Depuis 1991, les trafics de substances radioactives sont plus fréquents, impliquent des "livraisons" plus importantes, de manière elles-mêmes plus dangereuses, c'est-à-dire de qualité militaire. Les trafics se font en général dans la périphérie européenne ou mouyen-orientale de l'ex-URSS et concernent sans exception ses installations nucléaires. Rappelons que l'URSS possédait + ou - 20000 charges tactiques conçues et manufacturées dans 1500 centres de recherches nucléaires militaires et 150 usines d'assemblage.
Rien qu'en 1994, l'Allemagne a connu 267 affaires de trafic de substances radioactives sur son territoire. Plus généralement : de septembre 1993 à fin octobre 1994, (dernières données communiquées) 20 affaires sérieuses de trafic sont parvenues à la connaissance de l'AIEA (Organisme dépendant de l'ONU, consacré au contrôle de l'énergie atomique) et d'Euratom concernant divers pays et plusieurs matières.
_Pays : Allemagne : 4 cas ; Roumanie, Turquie et Suisse : 3 cas ; Slovaquie : 2 cas ; Russie, Bulgarie, Estonie, Hongrie et Pologne : 1 cas.
_Matières : Uranium hautement enrichi : 4 cas ; Plutonium : 3 cas ; Uranium faiblement enrichi : 6 cas ; Uranium naturel : 6 cas ; Uranium appauvri : 1 cas.
L'analyse des enquêtes menées sur ces affaires permet d'émettre les conclusions suivantes.
A ce jour, pour ce qui concerne l'Europe, aucun trafic par des Organisations Criminelles Transnationales (mafias) n'a été décelé - mais les experts officiels occidentaux semblent peu informés de probables trafics vers le Proche et Moyen-Orient et l'Asie du Sud. Extrênement dangereuses pour les convoyeurs et les populations exposées, les méthodes de transports en usage dans la plupart des cas connus, montrent qu'il s'agit encore d'un artisanat où abondent les amateurs et parfois les escrocs.


Un trafic bien organisé

Une vigilancesoutenue s'impose cependant : des groupes déterritorialisés et à l'abri de la réciproque nucléaire (fanatique divers, écoterroristes, sectes apocalyptiques comme Aum Shin rikyo au Japon) pourraient utiliser ces substances pour fabriquer une bombe "sale" (explosifs classiques + produits radiotoxiques) ; voire procéder par pur et simple épandage. Ainsi, une "bombe radiologique" explosant place de la Concorde (quelques kilos d'un explosifs banal et 500 grammes d'Uranium 239), ferait-elle de plusieurs kilomètres carrés du centre de Paris une zone interdite, le temps d'une décontamination qui pourrait prendre trente ans.
Reste enfin le risque, plus lointain dde l'éventuelle "récupération", par des groupes dangereux, d'armes nucléaires tactiques qui semble toujours sous contrôle dans l'ex-URSS.
Signe de la réalité de la menace : aux Etats-Unis, la "Nuclear Regulatory Commission" a exigé en août 1994 que des barrages anti-voitures piégées soit exigées devant toutes les centrales nucléaires civiles du pays. Et en avril 1994, à Budapest, le FBI a ouvert sa première école de formation policière hors des Etats-Unis. Au centre des cours qui y seront dispensés, la répression des trafics, sputéfiants et substances nucléaires. A peu près au même moment, la police slovaque démantelait, dans le nord-est du pays, un réseau de trafic nucléaire. Au moment de l'arrestation, quatre Slovaques, trois Hongrois et deux Ukrainiens étaient en possession de 50 kilos d'Uranium 238 - certes d'usage non militaire, mais extrêmement toxique quand même...


A quoi sert l'AIEA ?

A vienne, en Autriche, siège l'un des départements les plus énigmatiques de l'ONU : l'Agence internationale de l'énergie atomique. Créé en 1953 au début de la guerre froide cet organisme a pour rôle de promouvoir l'utilisation de l'énergie civile nucléaire dans le monde, il devrait aussi veiller à ce que tous les pays avec lesquels il passerait des accords n'emploient l'atome qu'à des fins pacifique. Au fil des ans l'agence de Vienne portera la bonne parole nucléaire dans les 118 pays qui ont signé des accords avec elle. Elle élabore également les normes de sécuritéà l'échelle planétaire. Cette mission de Bon Samaritain, à laquelle elle consacre plus de 65% de son budget, est doublée d'un rôle de gendarme, afin de détectertout détournement de matériels nucléaires civils à des fins militaires. Dans cette tâche, qui devrait être primordiale afin de lutter contre la prolifération de l'arme atomique, l'AIEA n'a guère connu de succès, pour des raisons de statut, d'organisation et de budget.
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Publié le 25 octobre 2003
Modifié le 25 octobre 2003
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