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Pink Floyd : Dark Side Of The Moon

Un des albums les plus vendus de tout les temps mais aussi certainement un des meilleurs. Critique pas évidente d'un voyage musical qui ne l'est pas plus.


Pink Floyd. Qui ne connait pas ce groupe, au moins de nom ? Un des groupes de rock (oui, pour moi c'est du rock) les plus connus et les plus influents. Et ceci est certainement leur chef d'oeuvre. Comme d'hap, petit rappel du lineup du groupe pour cet album :

David Gilmour : Vocals, Guitare
Roger Waters : Basse; Vocals
Richard Wright : Claviers, Vocals
Nick Mason : Batterie, Vocals

Attention tout de même, oreille non avertie s'abstenir, car cet album est certainement un des plus difficiles d'accès que j'aie jamais entendu. Je ne vous cache pas que la plupart des gens à qui je l'ai fait écouter n'ont pas mais alors pas du tout apprécié le voyage musical offert par Waters et consorts qui nous exposent ici les dommages que peut faire la société actuelle sur la senté mentale des Hommes (si, si :p). A noter que les interprétations des paroles sont ma vision personnelle, il y en a certinement d'autres.


Analyse piste par piste

1a - Speak To Me (Mason)
L'album s'ouvre, chose plutôt étonnante, sur une sorte de pot-pourri des chansons de l'album. En effet, on retrouve la voix déjantée de Clare Torry dans The Great Gig In The Sky, l'ostinato de Money et encore quelques autres. Puis on a droit à une intro somme toute assez classique, sorte de mise en jambe avant le grand saut.

1b - Breathe (Waters-Gilmour-Wright/Waters)
La musique est encore une fois assez simple même si on voit que les musicient maitrisent leurs instruments respectifs à la perfection. Les paroles nous parlent ici de la demande constante de plus de travail pour plus de production que demande la société au travailleur lambda.

2 - On The Run (Gilmour-Waters)
La première réaction de n'importe qui (y compris moi), serait de se dire "qu'est-ce que c'est ? Techno ? Trance ? ". Non, non c'est bel et bien du Pink Floyd et l'esprit de sette chanson tel que je le vois est tout simplement de nous raconter la course effrénée à laquelle la société contraint les Hommes.

3 - Time (Mason-Waters-Wright-Gilmour/Waters)
Au début de la chanson, un ignoble son de pendules, cloches et autres objets metalliques envahit nos oreilles jusqu'au fond de notre cerveau. Ce bruit, je vous avertis est carrément insupportable. Heureusement il ne dure que quelques secondes et ensuite on a droit à une musique encore une fois des plus classiques. Les paroles nous racontent ici la fuite inexorable du temps. On voudrait faire tant de choses dès qu'on a un moment de libre, mais on doit aussitôt reprendre nos obligations et l'ennui des journées de travail.

A la fin de la chanson, ça repart sur Breathe pour un couplet de plus qui chante le bonheur qu'on peut avoir à rentrer chez soi après une dure journée de travail.

4 - The Great Gig In The Sky (Wright / "Chant" : Clare Torry)
Au début, rien d'exceptionnel. Un piano et quelques nappes de synthé. Puis arrive Clare Torry et ses vocals complètement déjantés (il faut l'écouter pour comprendre). Le groupe lui avait demandé de rendre sa voix la plus folle possible, et force est de constater que c'est très bien réussi. Pas de paroles, mais cette chanson représente le besoin d'évasion qui se trouve en chacun de nous.

5 - Money (Waters/Waters)
Un des plus grand hits du groupe, mais qui bizarrement s'intègre assez mal musicalement avec le reste de l'album. C'est une chanson exceptionnelle si on la prend toute seule. Tout y est : une rythmique entraînante, des paroles de qualité, un solo de guitare exceptionnel et un saxophone génial. MAIS si on prend l'album dans son ensemble, on se demande ce que cette chanson fait là. Les peroles (ce n'est pas une surprise) dénoncent le dieu-argent qui commençait déjà à sévir au début des années 70.

6 - Us And Them (Waters-Wright/Waters)
Encore une fois, cela reste très simple musicalement (ça doit petre pour ça que Money fait tache). Simple mais efficace. Cette fois ci, Waters (puisque c'est lui qui signe toutes les paroles de l'album) prend pour cible la guerre et en particulier les Généraux qui bougent des lignes sur une carte sans se soucier le moins du monde que ces lignes sont, à un autre niveau, des êtres humains tout comme eux-mêmes.

7 - Any Colour You Like (Gilmour-Mason-Wright)
Là je vous avoue que je n'ai toujours pas réussi à percer les mystères de ce morceau instrumental. Mais nul doute qu'il doit avoir une grande importance dans l'album. Les claviers sont omiprésents dans le fond, la guitare et la batterie sont toujours aussi bien maitrisées. De la grande musique tout de même.

8 - Brain Damage (Waters/Waters)
Là, c'est beaucoup plus simple à cerner. Le sujet est devanu complètement abruti par la société dans laquelle il vit comm en témoigne le titre, les bruits de rire malsain dans le fond et cette phrase : "There's someone in my head, but it's not me. ". Musicalement c'est après money mon morceau préféré de l'album.

9 - Eclipse (Waters/Waters)
Cette chanson nous dit qu'un individu à ce point abruti par la société n'a plus de gouts, plus de sentiments, plus qu'une existence vide. Car tout cela a cours sous le soleil mais "The sun in eclipsed by the moon. ". On peut entendre dans le fond la voix de Clare Torry.


Analyse globale

Un voyage musical qui n'aura duré qu'un peu plus de quarante minutes, mais qui semble si long et si court à la fois. Vous aurez sans doute remarqué que mes analyses des paroles étaient assez fragmentaires. En fait cet album est VRAIMENT difficile à cerner. Peut être que quand j'aurai une bonne trentaine d'années de plus, tout m'apparaitra limpide. Mais il n'empeche que tout ça fait réfléchir. Je ne peux que vous encourager à l'acheter pour vous faire votre propre opinion dessus (et puis Money est un chanson magnifique). Mais ne vous attendez pas à un album rock avec des instruments qu'on peut bien cerner et une altenance Verse/Chorus/Verse/Chorus/Solo/Chorus, vous seriez grandement déçus.

Je viens de relire tout ça et ça me parait vraiment bizarre. Pas mauvais, mais vraiment bizarre. Peut être à l'image de l'album. En tout cas j'ai fait de mon mieux :D
. Voir tous les commentaires et/ou en poster un (11)
Re: Pink Floyd : Dark Side Of The Moon
Posté par the dysfunctionnal abdab sound le 11/11/2004 13:59:15
le plus commercial des albums du floyd apres the wall pour moi (je parle pas de la merde the division bell ca n'en vaut pas le coup)
je suis un gros fan des floyds jusqu'a cet album apres je suis moins preneur meme si j'ecoute de temps en temps the wall
je suis d'accord avec toi dans ta conception du "facile" au niveau technique ia pas de prouesse technique comme tu le di mais ce son de guitare,cette facon de jouer,ces claviers.............
pour moi les albums les plus difficiles d'acces c'est ummagumma et the piper at the gates of dawn quand tu ecoute astronomy domine ou interstellar overdrive........va pas me dire que pour une oreille non habituée c cool a ecouter le premier coup......
Re: Pink Floyd : Dark Side Of The Moon
Posté par lij le 29/10/2004 15:42:43
C'est celui que je preferes ........
Je sui d'accord avec toi qu'apres c'est devenu plus commercial qu'autre chose mais dark side est vraiment pour moi un bon album
Re: Pink Floyd : Dark Side Of The Moon
Posté par jeromra le 29/10/2004 15:17:53
... jtrouve que dark side of the moon est l'album du début du moins bien ... jmefaicomprendre : c'est sur cet album qur les houhous des apparaissent vraiment ... on sent la grosse machine, c propre, carré, ça n'expérimente plus trop ... les durées des morceaux sont raccourcis ...
enfin bref y'm fait chier stalbum!!
Re: Pink Floyd : Dark Side Of The Moon
Posté par lij le 27/10/2004 19:21:11
bon, j'ai pas eu le courage de lire tous les commentaires, mais je m'y mettrai !
Alors je trouve que tu est un peu dure quand tu dis qu'il est difficile d'accés , soit on aime les pink floyd, soit on aime pas ! Perso, c'est le groupe que je venere le plus , je demande souvent a mon papa de me raconter toutes les fois ou il les a vu en concert !
De toutes facons , les vrais pink floyd, c'etait du temps de syd barett , apres the wall , les pink floyd n'existent plus ! Bien sur , il y a la tournée "pulse" qui est magnifique , masi la vraie recherche éclictique est dans dark side of the moon , il n'y a qu'a regarder mon pseudo pour s'en rendre compte ! Francement , je crois que moins on parlera des pink , plus ils resterons a jamais ds nos memoires , pointdevue tout a fait personnel mais je tiens a dire tout de meme que pink Floyd , CA DECHIRE TOUT !
Re: Pink Floyd : Dark Side Of The Moon
Posté par sadelloyd le 01/09/2004 22:19:47
Merdeuuuu!! me suis trompé d'article :(
Voici donc pour vous le BON article lol
a+

Les trois vies de Pink Floyd

Nous sommes à la fin de 1966. Les premiers feux d'une nouvelle
ère brûlent sur les côtes de Californie. C'est une explosion comme le
monde de la musique n'en a jamais connu. Des groupes naissent et dis-
paraissent par centaines, emportes dans un élan. une suite accélérée de
transformations qui bien souvent leur échappent. Curieusement, les
pionniers de cette génération avaient les yeux tournés vers l'Angleterre
des Beatles, sur les airs desquels ils se branchaient. A l'époque,
« Revolver » faisait les beaux soirs des quelques dizaines de personnes
qui expérimentaient les nouvelles substances, LSD, psylocybine.
Parmi celles-là figuraient la plupart des gens qui devaient se trouver un an plus tard au centre du raz de marée de San Francisco.


D'abord : Interstellar Overdrive
Pendant ce temps, que se passait-il dans cette Angleterre d'où ils puisaient matière à planeries ? Rien pratiquement, si ce n'est, juste ment, la découverte par quelques amis, possédant de bonnes relations outre-Atlantique, de ces fameuses substances. Ainsi, dans le courant de cette nouvelle culture, Marc Boyic présentait un light show avec un groupe nouvellement formé, de retour des Baléares où ils avaient pas
mal expérimenté ces choses : les Soft Machine. De leur côté, des gens comme Miles, Jack Henry Moore, Jim Haynes commençaient à travailler sur un certain nombre d'entreprises formant petit à petit le noyau d'un underground vivant, avec des magazines, un hebdo (77), et, surtout, un endroit sur Southampton Row qui allait devenir l'épicentre de toute la révolution en Grande-Bretagne : UFO. C'était un sous-sol d'assez bonnes dimensions où l'on pouvait faire un peu de tout : projections des films de Jack Henry Moore et Yoko Ono, diapositives organiques de Marc Boyie sur des corps féminins en mouvement, et, bien sûr, beaucoup de musique. Trois groupes s'y illustraient régulièrement : le Bonzo Dog Doo Dah Band de Vivian Stanshall et
Neil Innés, héritiers à l'anglaise des Village Fugs de New York ; le Soft Machine, premier du nom ; et puis le Pink Floyd.
Panique psychédélique
II est déjà le plus accrocheur de tous, celui qui captive, provoque quelque chose qui tient le plus souvent du malaise. 11 est inquiétant, comme ces profondeurs psychiques que certains commencent à découvrir. A l'époque, il se compose de quatre copains d'université, anciens étudiants en architecture. Syd Barrett-guitare, Rick Wright-orgue, Roger Waters-basse, Nick Mason-batterie. Ils ont en commun une passion pour la musique, la faculté de triturer les sons, de jouer sur la gamme des larsens, des échos, des distorsions, de se servir de tout ce que la technique de l'époque met à leur disposition. Passionnés par leur présent, ils y trouvent une matière, une plate-forme d'envol pour leurs délires cosmiques. Grands amateurs de science-fiction, ils font reposer la plupart de leurs thèmes sur des sujets intergalactiques, des fantaisies où croissent pêle-mêle les voyages interplanétaires (Set The Control For The Heart Of The Sun), les rencontres fabuleuses de personnages boschiens (The Gnome) et les plongées dans les gouffres de l'inconscient.
C'est l'époque où le groupe est marqué par la personnalité de Syd Barrett. Syd est fou, et c'est là qu'il puise toute son inspiration. Héritier des korrigans qui se moquent de nos infortunes, lutin ricanant, son
rire angoisse, prend aux tripes, glace. En môme temps qu'il rassure, son humour ravage, grince, parfaitement lucide et clairvoyant. La voix est gouailleuse, un accent cockney à la Jagger, qui tranche avec les allures aristocratiques d'un Richard Wright. Syd fait peur, parce que son propos n'est pas de raconter des fleurettes bleuâtres, mais de se laisser aller à dire, simplement, ce qui lui passe par la tête. Et il s'avère, dès lors, que ces choses-là tombent juste. « Arnold Layne a des habitudes étranges / Collectionner les vêtements / Clair de lune / Contour dilué / Lui conviennent bien / Sur le mur pendait un grand miroir / Vue reformante / Regarde au travers petit / II adorait ça. » Inutile de se perdre en exégèses pour retrouver le sens de ces paroles. Dans le Londres de l'époque, c'est - comme toujours - la folie des couleurs changeantes, des costumes chamarrés, mais aussi des jeux divers que l'on essaie les uns après les autres. Les décors, les masques, les attitudes s'épuisent un à un et la réalité apparaît à chaque fois déformée. Lucidité du personnage Barrett, qui a senti ces choses. Les disc-joc-keys, eux, ne l'avaient sans doute pas perçu comme cela, car, voyant dans la chanson des allusions aux substances hallucinogènes, ils s'interdirent de la programmer comme les autres.
Et même l'Angleterre a peur de ces gens qui font une musique qui n'a rien pour rassurer, comme les y avaient habitués les gentilles compositions de Lennon-McCartney. Comble d'horreur, ce dernier affirme
publiquement faire usage de LSD. La panique psychédélique s'empare d'Albion et, bien entendu, ceux qui offrent l'image la plus ostentatoire de « compromission » avec cette culture sont les premiers à en pâtir.
Difficulté pour le Pink Floyd de faire passer sa musique sur les ondes, tournées houleuses où on les accueille parfois à coups de bouteilles. C'est que leur présentation sur scène est mal admise par un public
habitué aux vedettes pop traditionnelles. Les compositions, d'abord, font ressortir un climat étrange, tirant
parti jusqu'au bout, jusqu'à la limite du supportable, des délires intérieurs, des fantasmes, des prémonitions de catastrophes globales, de cataclysmes cosmiques. Les premiers, ils vont hurler ; pousser leurs voix dans des effets paroxystiques où se mêlent les cris de douleur, les ricanements et la peur muette. Un monde infernal qu'ils expriment de toute leur force, pour, petit à petit, s'en détacher et prendre totalement possession de leur médium : la musique. Comme si leurs voix et leurs instruments classiques seuls ne pouvaient suffire à traduire la profusion du chaos où ils entendent plonger le spectateur, ils leur ajoutent une multitude d'instruments hétéroclites, trompettes, sifflets, klaxons, cris d'oiseaux - imités à la perfection par Roger Waters -, en même temps qu'ils accomplissent un prodigieux travail directement sur le matériel d'amplification, avec le larsen, la distorsion, les grincements ; tout ce qu'un bruit amplifié peut produire de « différent » est bon à prendre. Faut-il voir là l'influence, avouée, de Stockhausen, l'intérêt porté aux diverses formes de musique contemporaine, très branchées elles aussi sur les thèmes de science-fiction ?
Et comme si cela ne suffisait pas encore à créer un climat déjà passablement difficile à supporter, ils se produisent en compagnie d'un projectionniste - Jo Cannon - qui les fait baigner dans une ambiance
hallucinante, à l'aide de toute une batterie de stroboscopes de couleur, de violentes lumières qui éclatent tout autour d'eux et attaquent les yeux pendant que les oreilles sont sursaturées de stridences implacables. Ils sont ainsi parmi les premiers à jouer à des niveaux d'écoute à peine tolérables des morceaux qui durent parfois très longtemps.
A l'époque, un morceau comme Interstellar Overdrive pouvait durer plus d'une heure en concert, et englober en medley la plupart de leurs autres compositions. Cette pièce extraordinaire, l'un des sommets
de leur période science-fiction, permettait alors à chacun des membres du Pink d'improviser longuement. Syd Barrett et Rick Wright, en particulier, se lançaient dans d'interminables dialogues hallucinés, à des
années de lumière de leur audience, tandis que, debout à l'avant de la scène, Roger Waters, immense, frappait sa basse avec d'amples mouvements des bras, hachés, disloqués, transformés par les stroboscopes
écarlatcs. On aurait voulu se détacher de pareil spectacle, chercher le repos quelque part, mais, quand le Floyd vous emmenait, il n'était plus question de descendre en marche. Les rêves brisés trop vite font ainsi
plus mal...
Mauvaises vibrations
A Londres, les choses évoluaient rapidement. Le psychédélisme bidon apparaissait un peu partout et se confondait, dans les apparences, avec les aspects plus authentiques. Et tout cela se diluait dans le gigantesque creuset pop. Les gens comme le Pink Floyd étaient déjà loin de ces contingences et travaillaient ferme, chacun à son niveau, avec ses instruments. UFO disparaissait. Ceux qui avaient voulu s'y fixer versèrent une larme. Les autres allèrent ailleurs. Le centre éclatait, tandis qu'un peu partout apparaissaient des groupes capables de faire vivre ces choses-là dans leurs villes respectives. Cela permettait au Floyd de
partir en tournée sans risquer de se faire assommer. Un public naissait.
A la fin de l'été 1967 paraissait leur premier album, « The Piper At The Gates Of Dawn ». Notons en passant que, depuis ce jour, ils ont sorti exactement un album par an, et ce toujours à la même date. Ce premier disque, heureux, violent, sans doute le plus rock'n roll de tous, était pour une très large part l'oeuvre de Barrett, et le reflet de son intérêt porté à la science-fiction, comme en témoignent les titres des compositions (Astronomy Dominé, Interstellar Overdrive). Hommage indirect aux substances lysergiques, cet album reste encore aujourd'hui parmi les trois plus représentatifs de cette année (avec « Sergeant Pep-
per's » et le premier album d'un groupe californien, les Doors), tant il s'insère à la perfection dans son contexte historique et musical. C'est au début de l'année suivante que les Pink vont être amenés à une sorte de confrontation avec la culture West Coast. A laquelle ils ne doivent pratiquement rien, ayant su développer chez eux quelque chose de profondément original, et répondant parfaitement dans ses formes
aux attitudes traditionnelles de leur propre pays. C'est donc deux aspects d'une révolution, identiques dans certaines de leurs motivations, différents dans leur façon de s'exprimer, qui se trouvent mis en présence. Habitués au psychédélisme gentil des groupes West Coast, les gens de San Francisco se montrent pour le moins surpris par l'apparition de ces quatre Anglais qui expriment violemment leurs angoisses, leurs lubies et tout leur petit monde intérieur, bien loin du socialisme quaker professé par l'Airplane.
Je me souviens qu'au même programme figuraient Janis Joplin et Big Brother and The Holding Company, des super-idoles du coin. Les Pink Floyd étaient là, en première partie, avec leur violence agressive, leurs couleurs dures, leur musique aux frontières du tolérable, stridente, à faire courir d'étranges frissons le long de la moelle épinière. Et il y avait dans la salle (Winterland) 4 500 personnes venues pour
danser gaiement avec la mère Joplin. Les quatre Floyd étaient donc vraiment seuls, face à une certaine hostilité vis-à-vis de ce que les gens du pays prenaient pour des mauvaises vibrations et qui n'étaient au
fond que l'expression d'autres parties d'eux-mêmes, moins facilement admises, certes, moins marrantes, mais existant quand même, et donc bonnes à exprimer pour voir à quoi elles peuvent bien ressembler. Les
applaudissements furent un peu froids. Le public était resté figé pendant tout leur passage, incapable (?) de comprendre ce qui se passait, violemment surpris, dérangé, voire choqué, plongé dans un état de transe. Les Anglais ne leur disaient-ils pas, après tout, la même chose que le Dead, avec simplement un autre vocabulaire ? La récréation vint avec Janis et Big Brother. Mais ce soir-là, bien des freaks, à San Fran-
cisco, se sont posé quelques petites questions sur eux-mêmes et leur culture en vase clos.
Ensuite Set Th Controls For The Heart Of The Sun
A la fin de l'été 1968 paraît le second album du Pink Floyd, « A Saucerful Of Secrets ». Syd est parti, et déjà on le regrette. Roger Waters prend alors de plus en plus d'importance dans le groupe. Il y fait entrer son ami David Gilmour, écrit la plupart des compositions et oriente les activités du Pink Floyd vers quelque chose de plus structuré, de plus travaillé. Aussi méthodique que Barrett savait être « éclaté », passionné par la technique et tous ses aspects, il va définir- avec l'aide de Rick Wright (clavieriste)- ce qui, de nos jours encore, peut être considéré comme un « son Pink Floyd ». « A Saucerfui Of Secrets » a été en grande partie écrit, composé et enregistré en présence, sinon avec la collaboration, de Syd Barrett. Son influence est encore très forte, ainsi que le montre le morceau principal de l'album inscrit dans la lignée du mémorable Interstellar Overdrive. Lorsqu'il s'en ira, il emportera avec lui sa folie, une certaine forme d'humour caustique, absurde, typiquement anglo-saxon, dignement représenté de nos jours par Viv Stanshall, the human beau. Ah, Syd Barrett ! écrasons furtivement une larme, observons qu'aux improvisations d'antan ont succédé la rigueur de l'écriture et le respect à la lettre de la composition, et réécoutons encore les deux premiers albums, avant d'entrer de plain-pied dans la nouvelle ère du Floyd.
Pour nous, elle va poindre avec la musique du film de Barbet Schroeder, More. Les musiques de film, ils connaissent bien : depuis leurs débuts, des producteurs fascinés par le côté « angoisse, mystère et trouble » de leurs compositions leur en demandent. Citons, entre autres : The Committee, Zabriskie Point et... More. Pour ce dernier, ils vont faire un effort particulier et montrer jusqu'à quel point peut aller leur conscience professionnelle. Composée l'après-midi en regardant les rushes du film, enregistrée la nuit suivante, leur musique est, selon le mot de B. Schroeder, « mise en situation ». C'est-à-dire qu'elle ne
sort pas du contexte du film, qu'elle n'est pas là en plus, pour faire joli, mais fait partie de l'œuvre, en est un des éléments.
Pour Roger Waters (basse), auteur de la plupart des morceaux, c'est l'affirmation d'une prédominance acquise au sein du groupe. Le nouveau son, c'est lui. Ce balancement, ces glissandos qui reviennent presque toujours, cette uniformité apparente, et qui évolue lentement dans le travail de distorsion des éléments sonores, ces échos, ces grands mouvements, cette ampleur - pour ne pas dire cette emphase -, c'est lui et son compère David Gilmour (guitare). Rick Wright (orgues et claviers), quant à lui, trouve maintenant davantage de place pour faire valoir sa grande culture classique, comme dans Cirrus Minor, où il ressort pratiquement le même solo d'orgue d'église que dans Saucerful Of Sectrets. Vu son grand talent, on lui pardonnera. Comme on pardonnera à Waters de n'être qu'un bassiste assez moyen du moment qu'il écrit des œuvres capables de faire sortir le meilleur d'eux-mêmes de gens comme David Gilmour, merveilleux instrumentiste et chanteur, responsable pour une bonne part de l'aspect aérien, planant comme un vol de mouette du Pink Floyd d'aujourd'hui. « More », album clé de cette nouvelle période, plus encore peut-être
que le somptueux « Ummagumma », qui paraît presque en même temps, reflète les sentiments, les attitudes profondes de quelqu'un qui est totalement engagé dans une œuvre. « More », c'est un individu qui exprime autre chose de strictement personnel dans ses rapports avec les hard drugs et la vision poétique provoquée par cette lutte au fond de soi-même. Alternance de moments calmes et de hurlements, succession de modes d'appréhension du monde extérieur différant radicalement selon l'état du personnage. Tout un univers interdit que seuls les grands poètes peuvent exprimer.
Nouvelle époque au sein des drug cultures qui prolifèrent dans les milieux anglo-saxons, où le Pink Floyd trouve sa part et son mot à dire. C'est l'année des grands espoirs, des vagues woodstockiennes qui annoncent à l'Europe les promesses floues d'un avenir communautaire sur fond de pop music. Année de festivals ratés, où il faut avoir une foi d'airain pour se trimbaler le sac au dos de ville en ville à la recherche d'une impossible communication dans l'herbe mouillée ou sur le froid béton d'un hangar désaffecté. Au cours de l'été, le Pink Floyd a enregistré un double album, « Ummagumma », moitié live, moitié studio, comme jadis les Cream. Cette partie live sera reproduite intégralement dans le peu de concerts qu'ils donneront chez nous ; à la note près - apparemment.
Ce souci de perfection dans leur travail, quel que soit le lieu où il doit s'effectuer, est encore une des caractéristiques du groupe. Et peut- être une des raisons pour lesquelles il demeure l'un des plus anciens à
survivre. Comme les Who, et pour des raisons assez semblables : professionnalisme impeccable, très grand respect du public, compréhension de la technologie et de la meilleure manière de s'en servir ; évolution lente, mais tranquille, parce que bien définie, cohérente, ouverte. Ces immenses qualités, le Pink Floyd est venu nous les présenter. Qu'à l'époque beaucoup aient fait la fine bouche, prétextant que leurs prestations scéniqucs étaient trop proches de l'album live, voilà qui est fort dommage car, quand bien même tel serait le cas, il n'y aurait pas lieu de les bouder pour autant. Reproche-t-on à Karajan de diriger toujours les mêmes symphonies de Beethoven ? Les Pink Floyd jouent une musique d'auteur, dûment composée et pour ainsi
dire orchestrée. Dès lors, il est normal que, d'une prestation à l'autre, des similitudes apparaissent. C'est sans doute cette continuité, justement, qui leur permet d'évoluer, de mieux travailler leur mode d'expression pour toujours en offrir quelque chose de nouveau, dans une direction bien claire. Des gens qui savent ce qu'ils font, ce qu'ils veulent et où ils vont.
Enfin… Echoes !
Ils vont d'ailleurs continuer d'en fournir démonstration sur démonstration en dépit des critiques accusant leur musique de tourner au mièvre. Celle-ci constitue un tout, c'est-à-dire une suite où chaque élément, quelle que soit son apparence, a une raison profonde de se trouver là à tel moment. Ainsi « Atom Heart Mother ». Les approches orchestrales entrevues dans la partie studio d'« Ummagumma » - où chaque musicien présentait sa propre version - vont se retrouver fusionnées en une œuvre commune, dès que la cohésion entre chaque
élément aura pu être assurée. Tout le travail du Floyd consiste essentiellement dans cette recherche permanente d'une part vers l'avant, évolution de la musique étroitement dépendante de celle de la technique, et de l'autre vers le centre, rassemblement des éléments, des expériences, des différentes formes de recherches particulières à chaque soliste. Alors que « Ummagumma » était un album révélant les aspects personnels, pour ainsi dire privés, de chaque soliste, « Atom Heart Mother » amorce un regroupement de toutes les forces, dans une œuvre à caractère nettement plus communautaire. Les individus un temps dispersés, pour les raisons évidentes que ces choses-là sont nécessaires pour assurer la souplesse d'un groupe, commencent à se retrouver et à reprendre l'œuvre en commun. Dans cette perspective, « Atom Heart Mother » annonce « Meddie ». Même si l'on trouve au premier moins d'impact qu'au second, on est obligé de reconnaître que, aans l'évolution musicale du groupe, il est indispensable. Parce qu'il clôt une période - les influences classiques - et dessine les esquisses d'une suivante. En fait. ces deux albums sont capitaux dans la demarche actuelle du Pink Floyd, pour s'engager dans une nouvelle voie, se renouveler complètement. Il était bon qu'ils fassent le point sur toute leur expérience passée, avant de commencer ce quelque chose Je nouveau qui va bouleverser totalement leur vision, leur ouvrir des horizons fantastiques, bref, leur donner cet essor qui peut les amener à envisager leur travail sous un autre jour. Ce qui ne va pas manquer d'apparaître dans leurs prochains concerts.
A propos de concerts, la façon de se présenter sur scène a toujours été très importante pour les membres du Pink Floyd. Il y eut la période des angoisses et des rêves délirants, avec les stroboscopes rouge et vert.
Il y eut aussi, grâce à Blackhill Enterprises, les tournées dans les universités et les concerts gratuits à Flyde Park. Un public très proche, une sensation d'intimité. Pour reprendre les termes de Roger Waters lui-même, ils ont toujours accordé une large place aux attitudes théâtrales, à la gestuelle et la présentation scénique inspirées du cirque, du grand-guignol. Il suffit d'admirer Waters frappant son gong : on dirait le culturiste de la Rank. Ce théâtre de la folie deviendrait, selon lui, plus calme aujourd'hui.
En effet, un nouvel élément a fait son apparition depuis quelques mois.
On en parle encore peu, et puis un de ces jours, tout le monde sera branché. Il s'agit de la quadriphonie : séparation en quatre canaux au lieu de deux pour la stéréo. D'où la nécessité de disposer d'enceintes
quadruples. Désormais, lorsque les dimensions et l'aménagement des salles le permettront, le Pink Floyd se produira avec un matériel quadriphonique. Cela signifie grosso modo qu'ils aimeraient jouer au
milieu du public, sur une scène centrale, avec la sono tout autour, devant et derrière le public, afin de l'immerger complètement dans leur univers sonore qui serait dès lors d'un volume plus raisonnable pour
accroître la réceptivité, laquelle, il faut bien le dire, souffrait passablement de sursaturation. Leurs futures prestations ne comporteraient plus dès lors qu'un seul morceau de l'ancien répertoire - Set The Control
ou Caref'ul W'ith That Axe -, le reste devant surtout être constitué de longues improvisations (?) sur des thèmes extraits de « Atom heart Mother » et « Meddie ». De plus, ils utiliseraient un grand nombre de
bandes magnétiques fabriquées par leurs soins et adaptées aux exigences de leur nouveau système de sonorisation. Ils rejoindraient ainsi certaines expériences, entreprises par des auteurs de musique contemporaine, desquels ils se réclament parfois. On peut donc s'attendre que le Pink Floyd apporte dans les prochains mois une dimension nouvelle à la musique d'aujourd'hui. Ce qu'ils n'ont jamais cessé de faire
depuis qu'ils se sont formés.

Alain Dister, in Rock & Folk, n° 62 (mars 1972).
. Voir tous les commentaires et/ou en poster un (11)
Publié le 28 août 2004
Modifié le 27 août 2004
Lu 3 391 fois

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