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L'Abandon |
Les espoirs déchus d'absolution après l'abandon... |
Je ne me rappelle pas du visage de l’homme qui me l’a offert, comme on offre un cadeau indésirable à quelqu’un qui n’a pas la force de le refuser. Je ne me rappelle ni de son visage, ni de ses gestes. Nous étions en automne, les feuilles tombaient par poignées autour de nous, le vent faisait virevolté le monde entier. Il faisait froid dans ses bras, je me rappelle de la peur, de la honte. J’ignore le nom de l’homme qui m’a forcé à accepter son présent, et lui aussi doit sûrement ignorer qu’en partant, il me l’a laissé. Notre rencontre n’aura durer que quelques minutes austères, froides, sombres. Et ces quelques minutes auront bouleversée ma vie d’un bout à l’autre. Personne n’aura jamais compris. Lorsque moi, j’ai enfin compris, je me suis exilé. Parfois, je me demande s’il l’a senti. La première fois qu’il a bougé, j’étais sur une route de compagne, cherchant un endroit ou dormir. Peut être voulait-il s’arrêter, lui aussi. Mais la fatigue ne m’a pas arrêter, moi qui ne voulait que fuir. Nous avons errer, lui et moi, pendant de longs mois. Et aujourd’hui, je crois que c’est ce lien, cette errance que nous avons commise à deux, qui me rattache toujours à lui. Il ne voyait rien, bien sur. Mais il sentait sûrement que quelque chose n’allait pas. Il le sentait sûrement. Et un jour, il a été propulsé dans un univers qui n’était pas le sien. Il a crié si fort, lui qui ne pouvait comprendre ce qu’il lui arrivait. J’aurais voulu lui expliquer, mais je ne voulais plus le voir. J’aurais voulu le consoler, mais ma décision était prise. Malgré tout, au dernier moment, alors que le médecin apportait mon enfant loin, si loin de moi, j’ai tourné la tête pour l’apercevoir. Un petit être qui me hante depuis ce temps, un petit être que je n’ai pas pu garder près de moi puisque je savais combien sa seule vue me rappellerait l’homme de la ruelle. Et depuis ce jour, chacune de mes minutes est occupées à croire que lui aussi, petit être devenu grand, pense quelques fois à moi avec ce même goût doux-amer qui envahi ma bouche et cette même douleur qui transperce mon cœur, comme à chaque fois que je m’attarde trop sur le souvenir de son petit corps frêle et de ses grands yeux apeurés qui semblent crier : Pourquoi, pourquoi? |
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