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La vraie vie


Déjà le premier jour, je n'étais pas à l'aise, je ressentais, comme pas mal de jeunes me direz-vous, une angoisse profonde, une boule au ventre de stress, de doutes, de regrets. J'aurai tout donné pour rester chez moi mais l'heure de rentrer dans ce fichu collège était bel et bien arrivée, et rien du tout n'aurait pu me faire épargner ces années de souffrance...



La 1ere année, on peut dire que ça se passait à peu près correctement, à part les pauses cantines qui se finissent jamais quand on a personne avec qui parler. J'étais très timide, pas facile d'aller vers les autres et j'étais perdue, séparée de mes amies d'enfance parce que je ne faisais ni allemand ni musique, et donc je méritais sans doute pas la 6eme 5 ! Mais je vécus cette 1ere année tant bien que mal. En 5ème, on peut dire que ça commencait à s'aggraver sérieusement. De Julie, j'étais soudain devenue "la grosse niaise" ou encore "gros cul": c'est sur que c'est moins commun comme nom... Je vivais en permanence dans la peur qu'on me coupe les cheveux en cours, dans mon dos, qu'on m'accroche des mots sur le manteau, ou encore qu'on réussisse à me pieger dans un couloir, pour me dire toutes sortes de mechancetés gratuites que les ptits cons de collegiens savent bien faire. Je faisais tout ce qu'on me disait de faire, "un crayon rouge ? Oui attend j'ai ! J'ai ! Tu le veux taillé ?? Attends, 2petites secondes tiens !! : le problème quand on parait faible dès le debut, c'est qu'on est tout de suite catalogué dans la rubrique des gens a maltraiter, et faut dire que devant ses lascards, j'osais pas trop ouvrir ma bouche. Il ne sait pas passé un mois sans que je sois malade, c'était psychologique me suis-je aperçue, quelques années plus tard. Mon corps se créait des maladies, et je ratais les cours, je restais dans mon petit lit, à l'abri, comptant les semaines et les mois en attendant la fin de lannée car me disait-on, "en 4eme, les classes se refont !!" en effet, elle se sont refaites; sans mes amies, "le groupe des grosses niaises", plus exactement. Pendant l' année de 4eme, j'ai été seule, sans aucune amie, et jen ai bavé à un point que je serais capable de tabasser les gens qui m'ont fait tant souffrir durant ce temps, tellement j'ai de haine à leur égard.


Un après midi, on joue au basket; j'adore ca, j'essaie de jouer correctement, j'y mets du cœur, je voudrais pas qu'ils m'en veuillent; et là, M et L de mon équipe débarquent dans mon dos en me donnant des coups, "tu te la pètes à mort hein, comment que tu te la joues, tu n'es qu'une merde, t'arretes de jouer comme ca, t'es pas la star, pauvre conne, pauvre niaise" il m'en faut pas plus pour me renfermer ! Je joue profil bas, je m'écrase comme on dit, redoutant leurs reproches et pourtant, je reçois encore des coups "mais t'es trop conne, essaie de jouer bien, tu fais rien là, t'es trop grosse pour bouger ton gros cul ou quoi, pauvre conne, pauvre niaise." et là, les larmes dans les yeux, la voix tremblante au possible, je lui rappelle que je peux avoir des cartes teléphoniques de collection pour elle, que j'en ai chez moi, qu'elle les aura demain, et sa voix devint mielleuse.
C'est toujours dans ces moments que les prof sont aveugles...
Pourquoi ai-je envie de raconter ça ? Parce que ça me trotte encore dans la tete, je me dis que la fin de mon enfance fut gachée par la connerie de quelques personnes dont ma principale du collège. Je suis allée la voir, après cette histoire, pour la supplier de me faire changer de classe: tout ce que j'ai eu en reponse, c'est que je n'étais qu'un bébé, et qu'il fallait que je grandisse un peu. J'aurais voulu, mais on ne peut pas grandir en se faisant piétiner chaque jour un peu plus. J'avais 2 asiatiques dans ma classe, dont frères, cousins, cousines, s'amusaient à la sortie de l'école à me jeter des cailloux en m'insultant. Un des gars que je connaissais depuis que j'avais 6ans ! qui n'avait jamais été méchant avec moi, suivait l'avis des autres, parce qu'un groupe "autoritaire" en avait décidé ainsi au début. Je ne pouvais pas sortir le mercredi ou le samedi seule, parce que je me faisais cracher dessus, par justement tous ces cousins etc qui trainaient dehors et que je ne connaissais même pas. J'ai souffert terriblement. J'ai souffert de ses papiers glissés dans mon sac avec des caricatures de moi dessinés à la va-vite, de ses croche-pieds dans les couloirs, des bouts de papier jetés dans mes cheveux, des bruits de ciseaux pour faire peur, des moqueries, des insultes, des coups, des bruits de briquet dans la file de la cantine derrière moi, et de l'odeur du cheveu brulé.


Je raconte ces extraits de vie parce que je n'en ai besoin, parce que je veux que les jeunes collegiens lisent mon article, qu'ils sachent qu'une simple moquerie qui parait ridicule peut prendre des proportions énormes dans la tête de la victime, qu'être cruel à ce point, c'est inhumain, c'est gâcher le début de la vraie vie. Je suis restée au moins 2ans complets après le collège à avoir des sueurs froides dans la rue ou dans le bus, lorsque quelqu'un se mettait derrière moi, ou que quelqu'un explosait de rire.
Maintenant je suis moi, et je rêverais de leur faire payer tout ca, toute la haine à mon egard, et pour rien.
Maintenant je suis forte, et jamais je ne me ferai emmerder par qui que ce soit.


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