Extrait du site https://www.france-jeunes.net

Miss, ce mot faussement neutre


Comment un mot de quatre lettres peut être révélateur, où l'inconscient Freudien n'est jamais bien loin.



Au cours d'un échange, formel ou informel, il pointe le bout de son nez, il surgit quand on ne l'attend pas, il qualifie une personne sans donner l'impression de le faire. Le mot "miss" est un petit peu plus qu'une interpellation se substituant au prénom de l'interlocutrice. Sous couvert de neutralité, il peut recouvrir de l'affection et plus encore une insidieuse envie sexuelle quand ce n'est une attirance sexuelle certaine.


Encore une fois les rires ont fusé. Sans même chercher à comprendre la longue observation et les arguments m'ayant amené à cette conclusion, l'assistance m'a cloué au pilori : "N'importe quoi, c'est un mot qui veut rien dire.", "Attends, c'est comme si on voulait se faire toutes les filles à qui on donnait un petit nom... "


Acte manqué ou acte pas tout à fait consommé

Pourtant, mon postulat ne prétend pas me grandir, encore moins l'espèce masculine dans son ensemble. Je reconnais moi-même avoir utilisé abondamment ce mot de quatre lettres. Le plus souvent lors d'échanges avec des filles convoitées en vain par le passé, comme pour me donner une contenance, comme pour m'élever au-dessus de cet échec antérieur. Pourtant, en les qualifiant de "miss" je les ramenais à leur jeunesse, passée et/ou toujours d'actualité, donc je me plaçais moi-même dans la configuration de quelqu'un les voyant toujours sous le même prisme. Toujours au fond de moi investi des mêmes intentions à leur égard. Les sentiments disparaissent, mais pas les velléités sexuelles, vous parlerez toujours avec un brin de voix et un style différents à quelqu'un pour qui vous avez nourri des sentiments ou tout du moins des intentions (ou même avec qui vous les auriez satisfaites) qu'avec un interlocuteur/trice moyen (ne).
Il s'agit avant tout de conclure son message d'une manière personnalisée, mais qui ne laisse rien entendre de son attachement caché. Entendons-nous bien, il ne s'agit pas pour l'utilisateur du "miss" de planifier à tout prix la séduction de la fille à qui il l'adresse. Souvent, cela s'avère un échec du passé ou une fille précédemment abordée devenue une amie (selon une autre théorie qui veut que la plupart des filles amies sont celles dont nous avons échoué à sortir avec). Autrement dit, l'homme n'a plus nécessairement de velléités de conquête à son encontre, mais lâche par ce petit mot, pour parler de manière triviale "qu'il se la ferait bien". Une réminiscence qui l'empêche de conclure un dialogue écrit (texto, facebook, mail) de manière totalement neutre. Vous êtes sceptiques les mecs ? Mais avez-vous pour votre part adressé un "miss" à une fille moche ou du moins que vous ne trouviez pas à votre goût ?


Absence d'engagement

"Miss" possède toutes les qualités de camouflage sémantique appropriées. Il ne s'accompagne pas du "mon" ou "ma" possessif et engagé, mais tout au plus de "la", accentuant éventuellement l'unicité de l'interlocutrice avec laquelle on échange. Par sa taille réduite, il n'interpelle pas sa destinataire alors qu'il est une contraction du fameux et controversée "mademoiselle". Or ce dernier sera bientôt supprimé des formulaires administratifs pour ne pas être stigmatisant, à la fois pour une jeune femme dont cela pointerait la disponibilité et davantage pour une personne plus âgée jamais mariée, encore soumise à des quolibets et des pressions sociales de nos jours malgré la perte de vitesse de l'Institution Mariage. Ainsi le "miss" sera plus facilement délivrée à une femme "disponible" au niveau de son statut sociétal qu'à une femme mariée ou engagée officiellement dans une relation stable depuis des années. D'ailleurs nombre d'entre elles repèrent désormais le manège et mettent en doute le côté affectif censé revêtir cette expression, nous contraignant dés lors à mettre ce "miss" de côté...
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