Les allergies alimentaires, un phénomène en hausse
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Depuis les vingt dernières années, on assiste à un phénomène préoccupant dans les pays industrialisés : la hausse des allergies, qu’elles soient polliniques, aux acariens, aux animaux ou alimentaires.
Les raisons ? "Elles sont multiples, affirme Jocelyne Just, allergologue. Mais elles sont liées à notre mode de vie occidental : plus de pollution, le fait d’être plus loin de la verdure et des animaux, la consommation de produits reconstitués, la diversification tardive chez le nourrisson…"
Concernant les allergies alimentaires, on estime que 5 à 8% des enfants sont touchés. Les allergènes les plus fréquents à cet âge-là ? "L’œuf, le lait et l’arachide. A eux trois, ils constituent 90% des allergies alimentaires." Mais en général, "ces allergies guérissent au cours de l’enfance". Quant aux adultes, 3 à 5% d’entre eux sont concernés. Et là, les principaux allergènes sont "les fruits à coque, les crustacés, les légumineuses… des aliments très divers. Ce qui est normal, puisque l’alimentation se diversifie."
Mais ce qui inquiète encore plus, c’est que les allergies alimentaires deviennent de plus en plus sévères, avec notamment l’identification d’allergènes émergents : dans un communiqué publié le 15 février 2019, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) explique que le sarrasin, le lait des petits ruminants (chèvre et brebis), le kiwi, le pignon de pin, le-galactose (présent dans la viande de mammifère), les pois et lentilles sont autant d’aliments auxquels faire particulièrement attention, car ils "présentent un risque d’anaphylaxies, c’est-à-dire de réactions allergiques graves, parfois plus élevé" que certains allergènes plus communs.
Face à l’évolution des allergies alimentaires, il est alors d’autant plus important d’en reconnaître les signes, qui peuvent apparaître dans les deux heures suivant l’ingestion jusqu’à 48 heures après, afin de pouvoir réagir en conséquence. Voici les principaux symptômes.
Une urticaire localisée autour de la bouche
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6 signes que vous êtes en train de faire une allergie alimentaire
L'urticaire est l’un des symptômes les plus fréquents de l’allergie alimentaire. Elle se manifeste par des "papules, qui vont et qui viennent, sur la peau qui gratte, un peu comme des piqûres d’orties", explique le Pr Just. Elle peut être localisée "uniquement autour de la bouche – c’est ce que l’on appelle le syndrome oral – et accompagnée d’un œdème à cet endroit", ou généralisée.
L’eczéma atopique peut également être un signe d’allergie alimentaire : selon le site de l’Assurance Maladie, 4% des adultes allergiques à un aliment déclarent des manifestations de ce type.
Toux, crise d’asthme, rhinite : des symptômes respiratoires
Autre manifestation possible : des symptômes respiratoires tels qu’une toux, une rhinite ou encore une crise d’asthme.
L’association entre l’asthme, qui touche quatre millions de personnes en France, et l’allergie alimentaire est d’ailleurs complexe : des études ont montré que l’allergie alimentaire aggrave l’asthme, et inversement. Quant à la rhinite allergique, elle se caractérise principalement par des éternuements en salve, des écoulements et des obstructions nasales. On estime que 25% de la population est concernée.
A noter : si l’ingestion de l’allergène est la cause principale de l’apparition de ces symptômes, l’inhalation des vapeurs de cuisson de l’aliment, comme le poisson par exemple, peut parfois suffire à les déclencher.
Douleurs abdominales, vomissements, diarrhée :
des symptômes digestifs
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L’allergie alimentaire entraine également des symptômes digestifs, allant des douleurs abdominales à la diarrhée en passant par des vomissements. Mais comment savoir s’il s’agit d’une allergie et non pas d’une intoxication ou d’une intolérance alimentaire ? Selon le site de l’Assurance Maladie, chez l’enfant notamment, une allergie alimentaire peut être suspectée dès lors que les troubles digestifs sont peu significatifs et que l’un des parents est allergique (hérédité. "Les intolérances se manifestent souvent par des symptômes digestifs exclusifs et plus chroniques", ajoute le Pr Just.
Une conjonctivite qui touche les deux yeux
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La conjonctivite peut être d’origine virale, bactérienne, irritative mais également allergique. Elle correspond à une inflammation de la conjonctive de l’œil, une membrane muqueuse qui tapisse l’intérieur des paupières ainsi que le blanc de l’œil. Un œil rouge, un larmoiement, un œdème des paupières, des sécrétions avec paupières collées et des démangeaisons au niveau des paupières indiqueront qu’il s’agit d’une conjonctivite allergique, notamment lorsque les deux yeux sont touchés.
Un angio-œdème laryngé
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Parmi les symptômes graves de l’allergie alimentaire, on retrouve l’angio-œdème. Aussi appelé œdème de Quincke, il correspond à "un gonflement rapide de la peau et des muqueuses", explique le site de l’Assurance Maladie.
Il peut toucher les paupières, les lèvres, la langue, le pharynx, les mains, les pieds, le tube digestif et même les organes génitaux.
Mais il est particulièrement dangereux lorsqu’il touche le larynx, puisqu’il constitue un risque d’étouffement.+++
L’hypotension artérielle et le choc anaphylactique
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Lorsque tous les symptômes précédemment cités apparaissent en même temps, en l’espace d’à peine quelques minutes, et qu’ils s’associent à une chute de la tension artérielle, on parle de choc anaphylactique (ou anaphylaxie) :
"le stade ultime, c’est l’hypotension artérielle et le choc anaphylactique avec parfois des manifestations neurologiques voire un décès, affirme le Pr Just.
C’est fort heureusement rare, mais les réactions allergiques peuvent aller jusque-là."
Allergies alimentaires : la sévérité des symptômes dépend de l’individu
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Les signes de l’allergie alimentaire peuvent être combinés ou non, et apparaître en cas de consommation, d’inhalation ou même de contact cutané avec l’allergène, les protéines alimentaires pouvant également se trouver dans certains produits non alimentaires comme les cosmétiques.
Mais dans tous les cas, la sévérité des symptômes ne dépend pas de la quantité de l’allergène avec lequel on a été en contact : "Le seuil est variable d’un individu à l’autre, explique le Pr Just. Il y a des personnes qui sont très allergiques :
il suffit qu’un aliment ou qu’un objet ait été contaminé par l’allergène – par exemple, une personne allergique au lait mange avec une cuillère qui a touché du yaourt mais qui n’en contient pas – pour déclencher chez eux une réaction sévère.
Alors que pour d’autres, il faut qu’elles mangent un demi-paquet de cacahuètes pour avoir un syndrome oral."
Allergies alimentaires : quels traitements ?
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Plusieurs solutions existent pour traiter les allergies alimentaires qui entrainent ces types de symptômes (on parle d’allergies IgE-médiées).
La première consiste tout bonnement en l’éviction des allergènes, et pour cela, l’éducation thérapeutique des personnes allergiques et de leur entourage est nécessaire : "On apprend aux adultes, aux enfants et à la famille à savoir lire les étiquettes.... Parce qu’il est facile d’éviter les produits frais comme le lait par exemple, mais parfois, celui-ci peut se trouver dans des boulettes de viande et là, on ne le sait pas !", rappelle le Pr Just.
Et savoir lire les étiquettes, c’est en connaître les subtilités pour agir au cas par cas :
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"Il y a 14 aliments qui sont à déclaration obligatoire sur les étiquettes des produits, dont le lait, l’œuf, le soja, l’arachide et les fruits à coque.
On peut alors lire : ‘contient de...’, ‘contient des traces de...’, ou encore des formulations plus embêtantes comme ‘peut contenir....’ ou ‘fabriqué dans un atelier qui utilise...’.
En fonction du type de patient, celui-ci pourra choisir les produits sur lesquels il est inscrit ‘peut contenir’ mais pas ceux où il est écrit ‘contient de’, par exemple.
Mais en général, quand on est très allergique, toutes ces formulations indiquent que l’on ne doit pas consommer le produit en question."
Les personnes souffrant d’une allergie alimentaire doivent également garder en permanence sur elles une trousse de secours qui contient "un antihistaminique, un corticoïde, un bronchodilatateur et deux seringues d’adrénaline", au cas où l’allergène est consommé par mégarde.
Et chaque symptôme a son traitement. "On apprend à reconnaître les signes et à savoir ce qu’il faut faire : si l’on a une urticaire, on va prendre seulement l’antihistaminique ; si l’on a un œdème laryngé, on va prendre l’adrénaline ; si l’on a la crise d’asthme plus l’urticaire, c’est également l’adrénaline." Et attention : "on n’attend pas la chute tensionnelle pour injecter l’adrénaline ! On le fait avant, dès que deux organes sont atteints."
Autre solution possible, bien que très rare : la désensibilisation.
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Celle-ci consiste à "donner de petites doses d’allergène et à augmenter progressivement, pour que l’immunité aille vers la tolérance."
Contrairement à la désensibilisation aux pollens par exemple, celle aux allergènes alimentaires "est assez dangereuse", prévient le Pr Just.
Mais parfois, le bénéfice surpasse le risque : "Cela peut sauver des vies, notamment chez les personnes allergiques à un très faible taux. La proposition de désensibilisation se fera donc en fonction de l’aliment, de l’histoire du patient, et de la sévérité de l’histoire."
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